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Compte rendu de la conférence sur l’écologie

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Nora Bouazzouni : « Quand vous êtes une petite fille, vous voyez très tôt que la grosseur est indésirable »

Journaliste, écrivaine, traductrice… À trente-sept ans, Nora Bouazzouni a déjà travaillé pour une vingtaine de médias de renom, publié trois livres, co-scénarisé et même joué dans deux webséries. Spécialiste des thématiques de genre et d’alimentation, qu’elle explore notamment à travers le cinéma et les séries télé, la jeune femme observe notre société au prisme multiple d’une identité franco-algérienne et queer – une voix intersectionnelle encore largement minorisée. Nous l’avons rencontrée autour de son premier ouvrage, intitulé Faiminisme, quand le sexisme passe à table, paru aux éditions Nouriturfu en 2017.

© Twitter de Nora Bouazzouni

Si elle devait essayer de cuisiner le patriarcat, Nora Bouazzouni l’assaisonnerait avec une sauce mayonnaise maison, « donc bien moutardée », ou bien une béarnaise, parce qu’elle « aime bien l’estragon ». S’il semble difficile de rendre une oppression appétissante, il y a néanmoins visiblement moyen de se saisir du sujet avec humour sans rien ôter à la justesse du propos. C’est en effet en quatre chapitres aux titres savoureusement sarcastiques (tels que « Madame est asservie ! », ou encore « Patriarchie Parmentier ») que son essai Faiminisme décrypte l’étroitesse des liens entre nourriture et misogynie. En s’attaquant à des questions plus épineuses les unes que les autres – de « Où se cachent les cheffes ? » à « Le féminisme est-il nécessairement végétarien ? », en passant par « À quoi ressemblerait une assiette masculine ? » – Nora Bouazzouni s’intéresse notamment aux injonctions liées à l’alimentation que subissent les femmes et personnes perçues comme telles, mais aussi à l’écoféminisme, à l’exploitation des femmes dans le système alimentaire mondial et à la grossophobie.

Alimentation et grossophobie : quand la société s’ingère dans l’assiette des femmes

C’est d’ailleurs l’expérience de cette discrimination qui lui a permis, très tôt, d’identifier le sexisme alimentaire. « Quand vous êtes une petite fille, vous voyez très tôt que la grosseur est indésirable. […] J’ai grandi dans une famille où il y avait des remarques grossophobes quotidiennes », confie la journaliste : à table, son père faisait régulièrement mention du poids de sa mère. « Ça vous force à y penser et ça vous met face à une violence, une violence qui est liée à l’alimentation puisque les remarques étaient liées à ce que ma mère mangeait. » Elle cite également les insinuations des collègues à la cantine, d’une boulangère qui l’a marquée quand elle était enfant, ou encore des serveurs dans les restaurants (« Plus souvent des serveurs que des serveuses », précise-t-elle). « C’est dingue, la sans-gênance des gens. Ce qui est le plus mesquin et le plus pernicieux, c’est les remarques qui ne parlent pas de votre corps… mais qui en parlent quand même ! À travers ce que vous allez mettre dedans. »

À l’école aussi, elle a été confrontée à la grossophobie, bien qu’elle n’en ait pas directement été la cible. Elle se souvient particulièrement des cours de sport en équipes, où les capitaines devaient choisir les élèves qui les rejoindraient. « Moi, j’étais choisie en avant-dernier, souvent. Parce que juste après moi, il y avait la fille grosse de la classe », raconte-t-elle avec une moue amère. Elle explique qu’il y a « une corrélation » entre le poids et « ce que vous valez au sens physique, que ce soit dans les yeux des garçons ou des filles, mais surtout des garçons » (et glisse par ailleurs qu’à l’époque, les enseignant•es d’EPS n’interrogeaient pas vraiment le « biais sexiste » qui se révélait dans le fait de désigner systématiquement des garçons pour diriger les équipes).

De Fantômette aux sitcoms américaines, le mépris des gros•ses dans la fiction

Dès le plus jeune âge, Nora Bouazzouni a aussi perçu l’omniprésence de cette discrimination que vivent les personnes grosses dans la littérature qu’elle consommait. Elle se rappelle notamment son malaise en lisant la célèbre série jeunesse Fantômette de Georges Chaulet (emblématique de la collection « Bibliothèque rose » chez Hachette), créée dans les années 1960 : « C’est hyper bien d’avoir une héroïne androgyne badass, mais le problème, c’est qu’on fait passer son physique souple, élancé, athlétique, comme une caractéristique, une vertu, morale. C’est pour ça qu’elle résout les enquêtes et qu’elle est plus intelligente que ses copines [dont l’une, Boulotte, est en surpoids, et l’autre, Ficelle, très mince, ndlr]… parce qu’en fait, c’est presque pas une fille ! », contrairement aux deux personnages secondaires qui incarnent les deux pôles opposés d’une féminité clichée et exacerbée. Finalement, à Fantômette, la journaliste préfère l’héroïne de la « Bibliothèque verte » Alice Roy (Nancy Drew en version originale), créée par le collectif d’auteur•ices Caroline Quine dans les années 1930. « On ne neutralise pas son genre pour dire que c’est pour ça qu’elle est maline. […] Donc pour moi, c’était moins problématique. »

Celle qui est entre-temps devenue spécialiste en séries télévisées souligne également la grossophobie plus ou moins latente dans cet autre champ de la culture mainstream. « Vous voyez bien de qui on se moque […], que dans les comédies américaines ou françaises, le personnage gros, c’est le personnage rigolo, maladroit… et qui ne fait que manger ! Et il est un peu sale […], donc c’est jamais quelqu’un qui est montré comme courageux, qui a de l’agentivité [terme popularisé par lae sociologue Judith Butler et qui désigne la puissance d’agir, ndlr], voire qui est désirable… Ou alors c’est le geek, donc qui est intelligent, mais pas sexy, un peu bébête, un adulescent alors qu’il a 45 ans… Donc ce sont toujours des gens qui sont moqués, ou bien qui sont des faire-valoir du héros ou de l’héroïne. »

Des modèles féminins encore largement imparfaits, notamment pour les enfants

Nora Bouazzouni soulève également de nombreux autres aspects questionnables des représentations féminines dans la fiction jeunesse, et notamment dans les dessins animés – dans lesquels elle baignait étant enfant, puisque sa mère est nourrice. Elle se souvient particulièrement du jour où elle a été frappée par le personnage de Lili dans Franklin : « C’était la énième fois qu’elle était insupportable, c’était le stéréotype de la mean girl » (du personnage féminin dont le seul rôle est de semer la discorde dans le groupe d’ami•es, ndlr). Dans d’autres séries, on remarque immédiatement le « syndrome de la Schtroumpfette » (la seule fille dans un groupe de garçons, qui incarne à elle seule la féminité de la bande alors que les personnages masculins ont, eux, une réelle individualité, ndlr). Même dans des séries comme La Pat’ Patrouille qui respectent une parité de genres dans les personnages, le héros est systématiquement un garçon. « De toute façon », précise-t-elle, « pour moi… c’est une série problématique de droite. Pro-flic, etc. J’espère qu’il y a des gens qui font des thèses là-dessus ! »

Elle met en lumière cette focalisation sur les protagonistes masculins grâce à la « théorie du sac à main » développée par l’Américain Paul Feig, réalisateur du film Mes meilleures amies (Bridesmaids en version originale) : si un couple hétérosexuel entre dans une boutique de prêt-à-porter, la femme ne verra aucun problème à porter le sac à dos de son compagnon sur son épaule le temps que celui-ci essaye un vêtement. Au contraire, si c’est elle qui doit confier son sac à main à son partenaire, il prendra bien soin de le poser à ses pieds afin que tout le monde puisse constater qu’il ne lui appartient pas. Pour Paul Feig, c’est un mécanisme identique qui conduit le cinéma à préférer produire des personnages principaux masculins : les femmes n’ont pas de souci à se déplacer pour voir un film sans héroïne, alors que les hommes ne s’intéressent qu’à ceux qui mettent en scène un héros. Pour Nora Bouazzouni, le genre féminin est par essence « excluant » pour les hommes, qui se perçoivent eux-mêmes comme le genre neutre. C’est pourquoi beaucoup se sentent mis de côté lorsqu’on utilise l’écriture inclusive, notamment face à des pratiques comme l’accord de proximité, ou même par les réunions en non-mixité… alors qu’ils ne comprennent pas forcément ce que les femmes peuvent reprocher à la composition du CAC40, ironise la journaliste.

Combler le manque d’appétence universitaire pour le genre comme angle d’étude

Lorsque la toute jeune maison d’édition Nouriturfu, qui n’avait alors publié qu’un seul ouvrage, l’a contactée pour lui proposer d’écrire un livre qui mêlerait les thématiques de genre et d’alimentation, Nora Bouazzouni avait donc déjà beaucoup de raisons de s’exprimer… mais elle avait aussi le « syndrome de l’impostrice ». Et puis, « j’ai ouvert un Word, j’ai gratté trois pages d’un coup et je me suis dit “Ouais, je crois que j’ai des trucs à dire là-dessus, en fait” », sourit-elle. Son deuxième livre, paru sous le titre de Steaksisme, en finir avec le mythe de la végé et du viandard (Nouriturfu, 2021), c’est elle qui en a eu l’idée, pour compléter le premier dans lequel elle n’avait pas eu suffisamment d’espace pour développer tous ses arguments.

Pour elle, l’engouement autour de son premier essai vient d’abord d’un étonnant et persistant manque d’exploitation du croisement entre genre et nourriture dans la littérature scientifique en France. En effet, les sources qu’elle a utilisées pour ses recherches sont majoritairement anglophones. « En France, il n’y a surtout pas beaucoup de sociologues de l’alimentation. Oh, il y en a qui sont très connus, et qui ont d’ailleurs tous des noms d’animaux », s’amuse-t-elle (mentionnant notamment Jean-Pierre Poulain), « mais dans leurs bouquins, le genre n’est pas hyper fouillé. » En s’entretenant avec des enseignant•es-chercheur•euses spécialistes de l’alimentation, elle a réalisé qu’ils et elles avaient en fait un certain désintérêt pour l’aspect genré de leur sujet de prédilection, alors même que celles et ceux qui travaillent par exemple sur les troubles du comportement alimentaire ne voient « presque que des patientes » (elle insiste sur le féminin).

De plus en plus de porosité entre les milieux universitaire et journalistique

Ces échanges pouvaient d’ailleurs mener à des situations presque absurdes, où la journaliste se voyait exposer des arguments qu’elle avait elle-même écrits des années auparavant, par des universitaires qui avaient le sentiment de les avoir découverts de leur propre chef à l’instant même. Elle parle même, en riant, d’une sorte d’« universitairesplaining » inconscient (néologisme formé sur le modèle du mansplaining développé par les mouvements féministes, qui désigne la façon que peuvent avoir les hommes d’expliquer aux femmes des sujets qu’elles maîtrisent très bien, ndlr). « J’étais assez vexée », admet-elle, « parce que j’ai découvert que le milieu universitaire qui s’intéresse au sujet de l’alimentation n’avait pas lu mes bouquins. […] En fait, ils ne vont pas chercher à lire d’autres gens qu’eux-mêmes. Ils ne s’intéressent pas à ce qui peut sortir qui n’est pas écrit par un de leurs pairs. Et j’ai trouvé ça terrible. »

Toutefois, Nora Bouazzouni se félicite que cette barrière hermétique entre travail de recherche et travail journalistique se voie être petit à petit déconstruite, notamment par la transformation du secteur de l’édition. Si elle regrette, bien sûr, que l’économie du livre demeure « une catastrophe », elle applaudit l’élargissement de maisons d’édition spécialisées dans la recherche à des journalistes et militant•es, de même que la croissante publication d’essais universitaires chez des éditeurs généralistes. « Ça rend accessible une certaine forme de littérature, et surtout, je pense que ça change la manière dont certains et certaines chercheur•euses écrivent aussi. Parce qu’on voit aussi de plus en plus de personnes dont c’est le métier, la recherche, qui écrivent des livres accessibles pour le public, et non plus pour elles-mêmes, pour le milieu. »

Faiminisme : une boîte à outils accessible et militante

Un jour, en dédicace, une très jeune étudiante a confié à Nora Bouazzouni que la lecture de Faiminisme l’avait bouleversée, et surtout, qu’elle en ressortait avec des outils et des chiffres pour contrer les remarques sexistes de sa famille. « J’aimais cette idée-là, de donner de quoi pouvoir répondre », souligne la journaliste. « Moi, c’est ça que j’aime bien quand j’écris des livres, c’est que ce soit une forme de boîte à outils. »

C’est l’une des choses qui expliquent que la question de l’accessibilité lui tenait à cœur dès les prémices de l’écriture de son premier essai. Elle relie également cet objectif à son parcours dans le métier. Formée à France info, où elle a obtenu son premier poste de journaliste, elle a participé au lancement du site web dont le « mot d’ordre [était] d’être accessible », pour remplir sa mission de service public. Mais elle avait aussi une autre source de motivation, plus personnelle : « J’avais envie que mes livres soient accessibles aussi à mes parents », explique-t-elle, « qu’ils puissent lire mes livres, qu’ils ne se sentent pas bêtes devant des mots et qu’ils comprennent tout ce qui est écrit. » Elle ajoute qu’elle « espère écrire toujours des livres qui seront accessibles à tout le monde », même si elle concède que son troisième essai l’est probablement un peu moins.

Elle est en effet issue d’un milieu ouvrier ; ses parents ne lisaient pas la presse, « à part 20 minutes dans le métro à l’époque », et écoutaient RTL2, « pas de radio d’intellectuel•les ». Sa mère adorait cependant lire d’autres registres, notamment des romans policiers. C’est d’elle que la jeune femme tient le goût de la lecture, depuis toute petite. Adolescente, en plus de Jeune et Jolie, Nora Bouazzouni lisait d’ailleurs les magazines auxquels sa mère était abonnée. Femme actuelle était le seul féminin, selon elle « un peu “moins pire” que les autres [concernant la grossophobie], mais qui reste un féminin typique qui vous parle uniquement d’un point de vue hétérosexuel, avec que des femmes blanches dedans ». Elle note que « maintenant, ça s’est un peu amélioré, mais ça parle toujours de minceur, d’avoir l’air plus jeune et de minceur ». Une raison de plus d’écrire Faiminisme.

Entre sentiment d’illégitimité et désir d’authenticité

Nul doute que l’efficacité de ce court essai d’une centaine de pages tient en partie à son style simple et direct. Nora Bouazzouni revendique cette spécificité journalistique en relatant qu’elle s’est retrouvée bloquée au beau milieu de la rédaction de l’ouvrage, quand elle a réalisé qu’elle « se regardait écrire », et qu’elle n’a réussi à retrouver l’inspiration qu’en acceptant de se détacher des tournures d’universitaire qu’elle cherchait à reproduire : « À un moment donné, je me suis prise trop au sérieux. J’étais en train de m’auto-congratuler. Et c’est pas moi ça, je fais pas ça pour ça. Donc j’ai tout effacé et j’ai réécrit comme c’est. » Elle doit en partie sa confiance en son approche de l’écriture à son expérience chez Slate, où elle a travaillé en tant que traductrice avant de devenir journaliste, et où « il n’y avait pas ce truc où on se prend méga au sérieux ».

Et la touche humoristique, justement ? « C’est parce que c’est mon caractère, c’est comme ça que je parle, c’est comme ça que je suis. Je fais des blagues et j’avais pas envie d’endosser un rôle. » C’est d’ailleurs son authenticité que recherchait avant tout sa maison d’édition, qui appréciait particulièrement sa plume. « Je n’avais pas envie d’écrire un livre de sociologue, car je ne suis pas sociologue, et je ne suis pas universitaire non plus, je ne suis pas une chercheuse. Donc c’est un livre de journaliste », affirme-t-elle.

Un livre qui est né, entre autres choses, d’un sentiment d’illégitimité qu’elle ressentait plus jeune face aux productions littéraires dans le domaine des sciences sociales. « J’avais vraiment l’impression que pour lire des essais, notamment de sociologie, il fallait avoir fait des études de sociologie, ou bien être dans l’élite, les classes dominantes parisiennes qui lisent Le Monde, qui écoutent France Inter et France Culture », explique-t-elle. Celle qui, entre-temps, a travaillé pour Mediapart, Urbania ou encore Rue89, a mis un terme à ses études après une licence d’anglais – plus tard que ses parents, qui ont arrêté l’école à quatorze ans –, n’a « aucun background » en sociologie et n’a pas non plus fait d’école de journalisme. Si elle a toujours aimé lire de la fiction, elle a très longtemps pensé que la littérature scientifique n’était pas à sa portée, « que c’était juste pour les universitaires, et surtout pour les bourgeois », et qu’elle ne la comprendrait pas si elle essayait. En tout cas, précise-t-elle, elle est « très contente de vivre à une époque où les journalistes peuvent écrire des livres ».

Des conseils pour se détacher des injonctions sur le physique des femmes ?

Elle semble amusée par la question. « J’ai pas de conseils… Quand t’es journaliste, t’es dans les constats, pas les conseils. C’est les magazines féminins qui donnent des conseils. » Elle considère qu’il est « impossible » et même « obscène et indécent » de conseiller les femmes pour qu’elles puissent s’émanciper de leur inquiétude concernant leur physique, « dans une société qui te dit que de toute façon, ton corps est en travaux perpétuels et il ne sera jamais assez bien, […] donc continue de te sentir comme une merde parce que ça arrange bien l’industrie cosmétique, le capitalisme et le patriarcat. Parce que si on a trop confiance en nous… ça risque de faire des étincelles. »

Sa propre apparence physique, « à titre très personnel », elle nous avoue que plus elle « vieillit », plus elle « s’en bat les steaks ». Elle a cependant aussi conscience que ce n’est pas immuable, surtout que de nombreuses femmes sont angoissées à l’idée de prendre de l’âge. « Je serais bien mal placée, vu la gueule que j’ai, de donner des conseils à des femmes qui ont peur de vieillir. Reparlons-en dans 10 ans ! » Elle a du moins arrêté de vouloir incarner la féminité consensuelle, par exemple, en abandonnant les vêtements inconfortables. Un choix éclairé auquel la société la renvoie pourtant en permanence. « Mes cheveux courts, on m’en parle tout le temps ! J’ai les cheveux courts depuis 2009 ou un truc comme ça, et on m’en parle tout le temps. On me dit que c’est courageux d’avoir les cheveux courts pour une fille. » La « terreur » qu’éprouvent les femmes en s’imaginant couper leurs cheveux l’intéresse beaucoup. « Est-ce que les hommes sont terrifiés d’aller chez le coiffeur ? » insiste-t-elle. « On met notre féminité dans tellement de choses physiques. Les hommes mettent leur masculinité dans tellement de choses pas forcément physiques. »

Alors non, Nora Bouazzouni n’a pas de conseils à vous donner pour arrêter de vous prendre la tête avec votre corps… mais beaucoup de réflexions à soulever concernant l’intérêt qu’on peut trouver à maîtriser la performance de genre. « Parfois, j’ai envie de performer ce rôle-là [de la féminité stéréotypée] », concède-t-elle. « Mais juste pour moi. […] Après, j’ai jamais été dans l’hyperféminité, ça n’a jamais été mon truc. J’ai essayé mais ça ne marche pas, c’est pas moi. »

La performance de genre, entre un atout et une question de survie

Dans notre société actuelle, si la performance de genre peut être perçue comme un jeu, elle peut même se révéler utile dans certaines situations, notamment dans le cadre professionnel. « Parfois, je performe la féminité traditionnelle quand je suis avec des interlocuteurs que j’ai envie de convaincre… Quand je vais être avec des vieux hommes blancs cis [non trans, ndlr] », précise la journaliste. « Je vais être hyper souriante et leur dire des trucs quand même un peu hardcore. Ça permet de faire passer des messages. […] C’est une violence ! Je ne dis pas le contraire. Mais il y a des endroits et des situations où ça peut nous être favorable. » Elle rappelle toutefois que pour nombre de personnes, l’enjeu de cette performance est tout autre : c’est parfois « une question de survie », comme cela peut par exemple être le cas pour certains hommes homosexuels considérés comme « efféminés », qui se contraignent à changer de voix ou de démarche lorsqu’ils rentrent chez eux pendant la nuit, afin d’éviter d’être passés à tabac s’ils sont perçus comme manquant de virilité. Nora Bouazzouni rapproche ce phénomène du code-switching employé par les personnes Noires aux États-Unis, qui naviguent par exemple entre plusieurs registres de langue selon si elles sont en compagnie de leur communauté ou si elles s’adressent à des personnes blanches. En France, dit-elle, un mécanisme similaire peut s’appliquer pour les hommes racisés (pouvant subir du racisme) lors des contrôles de police.

Elle a elle-même expérimenté l’exclusion au sein de la communauté LGBT+ dont elle fait partie, particulièrement au moment où elle a quitté sa province d’origine pour monter à Paris, car elle n’en possédait pas encore les codes. « À l’époque, je me suis rendu compte que j’étais trop féminine pour le milieu lesbien. J’ai entendu des phrases comme – vraiment, je l’ai entendue, cette phrase, en soirée : “C’est qui, la petite hétérote qui s’est perdue ?” Alors que moi, enfin, j’étais contente d’avoir une communauté », raconte-t-elle. Selon elle, les cercles lesbiens, où l’androgynie est largement majoritaire, ne sont pas non plus exempts de discrimination : il y a « des codes qui sont excluants depuis très longtemps. Ça existe depuis le vingtième siècle, l’exclusion des lipsticks et des fems [termes qui désignent les lesbiennes dont l’expression de genre est plus féminine, ndlr]. C’est de la femphobie, finalement. » Dans ce milieu, explique la jeune femme, la discrimination qui subsiste est aussi particulièrement liée au poids. « Moi, je suis bie, mais il y a beaucoup de grossophobie dans les milieux lesbiens aussi. Toutes les femmes gouines qui sont grosses en parlent. Toutes les femmes qui ne sont pas conformes. [Le terme « gouine » n’est ici pas utilisé dans un sens péjoratif, mais dans une logique de retournement de stigmate fréquente dans la communauté LGBT+, ndlr] Les gouines grosses, les bies grosses et les pans grosses le disent toutes, il y a une vraie grossophobie. Même dans les milieux queer, il y a de la grossophobie, mais comme il y a de la transphobie, comme il y a du racisme, du validisme… Évidemment, ce n’est pas un milieu qui est totalement hermétique aux discriminations quelles qu’elles soient. »

Après deux essais consacrés à la question de l’intersection entre genre et alimentation, Nora Bouazzouni se concentre dans son troisième livre sur la relation entre nourriture et domination économique. Mangez les riches, la lutte des classes passe par l’assiette est en librairie depuis le mois d’octobre.

Entretien : ETR & PAL

Texte : PAL

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Grandes interviews

Grande Interview – Rencontre avec Corine Pelluchon

Corine Pelluchon, professeure de philosophie politique et d’éthique appliquée à l’université Gustave Eiffel, a accepté un échange avec nous de propos autour de son livre Les Nourritures – Philosophie du corps politique. Elle a reçu le prix Günther Anders de la pensée critique en 2020 et a été promue au rang de Chevalière de la Légion d’Honneur en 2021. On retrouve son énergie dans tous ses ouvrages, lesquels témoignent de sa passion pour les sujets qui la poussent à écrire. Ses œuvres reflètent une personne ayant une expérience riche et une sensibilité très grande. Après une quinzaine de livres qui témoignent d’une grande cohérence, elle vient de passer deux ans en Allemagne. Pour elle, partir à l’étranger permet de parler d’autres langues, de découvrir d’autres cultures et de prendre un peu de distance par rapport à son pays et à soi-même. Corine Pelluchon a acquis une certaine légitimité et ses ouvrages sont traduits dans plusieurs langues. Elle a conduit un travail de terrain pendant plusieurs années sur la fin de vie et l’éthique médicale, mais aussi auprès de nombreux acteurs impliqués dans le domaine de l’alimentation, de l’agriculture et de l’élevage, et a été auditionnée une vingtaine de fois par des représentants politiques pour des questions de société liées à la bioéthique, au rapport aux animaux et à l’écologie. Elle alterne des ouvrages de fond et des ouvrages destinés à un plus grand public et donne régulièrement des conférences en France et à l’étranger.

Être une philosophe

Nous avons débuté l’échange autour du fait d’être une philosophe aujourd’hui dans notre société. Comment le devenons-nous ? On voit que, pour elle, faire de la philosophie permet de poser des problèmes et de proposer sinon des réponses, du moins des pistes de réflexion aidant à affronter les défis actuels. L’origine de la philosophie est l’inquiétude. Celle-ci l’a conduite à philosopher sur la fragilité de la démocratie, sur la destruction de l’environnement et l’érosion de la biodiversité et sur les problèmes éthiques, politiques et existentiels associées à notre habitation de la Terre et à nos rapports aux animaux. Corine Pelluchon s’inscrit dans une longue lignée de philosophes.  En entretien tout comme dans ses livres, elle évoque ses prédécesseurs, notamment le philosophe Emmanuel Levinas. Ses travaux s’inscrivent aussi dans le sillage des Lumières, mais elle aborde ces dernières de manière critique, comme on le voit dans son livre Les Lumières à l’âge du vivant (Seuil, 2021) mais aussi dans sa thèse sur Leo Strauss (Leo Strauss, une autre raison, d’autres Lumières, Vrin, 2005).  Leo Strauss est un philosophe juif allemand qui assiste à l’effondrement de la République de Weimar et à la montée du nazisme et conduit une critique de la modernité en soulignant la nécessité, pour contrer la déshumanisation et résister au retournement de la démocratie contre elle-même, d’une éducation philosophique et morale exigeante. Cette interrogation demeure un fil directeur pour Corine Pelluchon. Cependant, juste après sa thèse, elle part un an aux USA et s’oriente vers les problèmes liés aux pratiques médicales, aux biotechnologies ainsi qu’à nos rapports aux animaux et à la nature.  Autant de questions qui supposent d’examiner à nouveaux frais la manière dont nous pensons l’humain et de s’interroger sur les conditions permettant d’y répondre de manière démocratique. Selon elle, le rapport aux animaux est important en lui-même et il a aussi une dimension stratégique, révélant ce que nous sommes devenus ou ce que notre modèle de développement a fait de nous : la maltraitance animale, qui est, à ses yeux, une figure du mal, pointe les dysfonctionnements et les contradictions de notre société et souligne la violence extrême que nous acceptons d’infliger à d’autres êtres sensibles. Ainsi, la philosophie aide à concevoir des pistes de réflexion pour renouveler la compréhension que nous avons de nous-mêmes et de notre condition, que Corine Pelluchon pense en insistant sur notre vulnérabilité et notre dépendance à l’égard des éléments, des écosystèmes et des autres vivants. Il importe également de prendre conscience à la fois des obstacles au changement social et des leviers pouvant nous amener à opérer la transition écologique et solidaire qui est nécessaire pour éviter l’effondrement.

Nous avons continué l’échange autour de son ouvrage Les Nourritures publié aux éditions du Seuil en 2015 puis une nouvelle fois publié en format de poche en 2020. Il s’agit d’un livre solaire, porté par une certaine énergie. Les Nourritures est un ouvrage apportant des pistes de réflexion fondamentales pour penser la condition terrestre de l’humain et faire entrer l’écologie et la justice envers les animaux dans la démocratie. L’écologie est articulée à une philosophie de l’existence qui prend comme point de départ notre besoin de manger, le fait que « vivre » est toujours « vivre de » et « vivre avec ». La citation suivante illustre cette idée : « Manger est un acte économique, moral et politique. » Trois ans plus tard, elle publie Éthique de la considération (Seuil, 2018) qui est la suite des Nourritures : l’auteure, après avoir montré les implications éthiques et politiques de sa philosophie du « vivre de » et des nourritures, s’interroge sur les motivations concrètes qui poussent les individus à agir. Elle se demande quelle transformation de soi peut réduire le décalage entre la théorie et la pratique, la pensée et l’action, qui est l’un des défis majeurs, de nos jours, puisque cette prise de conscience, bien que beaucoup reconnaissent la réalité et la gravité du réchauffement climatique et admettent l’importance du bien-être animal, n’est pas suivie de changements réels dans les styles de vie et les modes de production.

Comment arriver à motiver les individus afin qu’ils aient un désir de changer ?

Éthique de la considération s’interroge sur les manières d’être des personnes et sur le lien entre représentations, valeurs ou évaluations, émotions et comportement qui pourraient nous permettre d’être plus sobres, d’avoir du plaisir à changer nos styles de vie et à répondre aux défis actuels de manière démocratique. Pour Corine Pelluchon, la considération renvoie à un processus de transformation de soi qui conduit le sujet à reconnaître son appartenance au monde commun, qui est lié aux générations passées, présentes et futures et au patrimoine naturel et culturel et forme une transcendance dans l’immanence. Cette prise de conscience, qui est en réalité une expérience qu’elle appelle transdescendance, s’effectue en approfondissant la connaissance de soi comme être charnel, vulnérable et engendré, et modifie en profondeur le sujet. Ses aspirations et ses affects changent. Percevant l’épanouissement des autres vivants comme une composante de son propre épanouissement, il n’a plus envie de les dominer. La considération, qui est le contraire de la domination, implique que l’on ait comme horizon de ses pensées et de ses actions le désir de transmettre un monde habitable. 

Dans Les Nourritures, Corine Pelluchon pense l’écologie comme la sagesse de notre habitation de la Terre qui est toujours une cohabitation avec les autres, humains et autres qu’humains. L’écologie possède donc une dimension sociale, liée au partage des nourritures et à la manière dont nous cohabitons. Elle a aussi une dimension existentielle associée à la manière dont nous nous comprenons, ce qui est inséparable, de nos jours, d’une réflexion sur le caractère destructeur de nos modes de production et sur les souffrances que nous infligeons aux animaux. La philosophie offre des concepts et un questionnement complexe qui ressort de l’écologie politique, même si ce travail se distingue du militantisme et de ce que font les partis politiques.

Dans Les Nourritures, l’auteure insiste sur l’essence généreuse du monde. En effet, les aliments ne sont pas des objets de représentation et leur saveur est plus riche que ce que nous pouvons décrire par le concept. De plus, nous ne mangeons pas seulement pour satisfaire nos besoins, mais, en mangeant, il y a une dimension de plaisir, une manière de savourer les aliments qui illustre cet excédent du sentir.  « La vie est aimée et est elle-même sa propre fin », écrit-elle en citant Levinas. Il importe de tenir compte de ce que révèle le plaisir attaché aux choses sensibles, leur richesse, leur excédent qui va au-delà du besoin et fait la grâce de la vie. Ainsi, Corine Pelluchon écrit : « En insistant sur le plaisir attaché au fait de vivre et en associant la justice à la convivialité, cette philosophie promeut un humanisme de partage, selon lequel mon bonheur ne dépend pas seulement de ce que je possède et m’approprie, mais également de la place que j’accorde aux autres êtres humains et non humains, ainsi que de la transmission d’un monde commun » (Les Nourritures, p. 328).

Manger comme acte social total : « Vivre de … »

Manger renvoie à l’oralité. En effet, cet acte est une incorporation, puisque quelque chose d’extérieur vient à l’intérieur de soi. Les troubles de l’alimentation sont aussi des troubles d’oralité, au sens où il y a un refus d’incorporer ou à l’inverse une volonté de se remplir en se jetant sur la nourriture. Ainsi, l’existence n’est pas seulement à penser à la lumière du projet, mais il importe d’insister aussi sur sa dimension de réceptivité. Cette porosité entre moi et le monde renvoie à une philosophie du sentir qui met au jour notre être-avec-le-monde-et-les-autres. Le fait de manger est un fait social total, à la fois biologique et culturel, intime et culturel, voire symbolique, et il a une signification éthique et politique sur laquelle l’auteure des Nourritures insiste plus particulièrement. Afin d’expliciter son propos, elle écrit :« Manger est un dire (…) Quand je mange, je dis la place que j’accorde aux autres, humains et autres qu’humains, au sein de mon existence (…) Je dis si j’assigne des limites à mon bon droit au nom du droit des autres à exister (…). Je montre si je suis prête à faire couler le sang des bêtes, à tolérer le gavage des oies, pour un plaisir substituable ».  Plutarque exprimait l’idée que l’alimentation carnée n’est ni naturelle ni nécessaire et que la violence imposée aux animaux est injuste et disproportionnée. Enfin, la faim ou la malnutrition ne sont pas liées essentiellement à des pénuries, mais à des problèmes de justice, de spéculation, d’accès à la nourriture disponible.

Propositions liées à l’ouvrage

La protection de la biosphère, la justice envers les autres, humains et autres qu’humains, et la préservation de la biodiversité sont entrées dans la politique, mais les changements menant à des transformations dans les modes de production et de consommation et sur le plan des structures sociales et économiques sont difficiles à effectuer. La pesanteur des habitudes et surtout les intérêts économiques constituent des obstacles. De manière générale, même quand l’humain sait quel est son bien, il ne le fait pas forcément. Comme Hobbes l’a montré, les hommes ne veulent pas forcément aujourd’hui ce qu’ils ont voulu hier. Ainsi, si la protection de la biosphère est une condition de notre existence et s’impose comme un nouveau devoir de l’État, il importe d’en faire une norme, de revenir pour cette raison à l’idée du contrat social. La deuxième partie des Nourritures présente ainsi un nouveau contrat social. Ce dernier ajoute aux finalités classiques du politique, c’est-à-dire à la coexistence des libertés et à la réduction des inégalités, la protection de la biosphère, la justice envers les générations futures et les autres espèces, le bien-être animal et la convivialité, le fait que vivre n’est pas seulement survivre, mais avoir du plaisir à vivre.  Dans ses autres ouvrages, Corine Pelluchon s’interroge sur les conditions permettant concrètement d’arriver à des améliorations de la condition animale dans une démocratie pluraliste, où les individus n’ont pas les mêmes intérêts ni les mêmes représentations (Manifeste animaliste. Politiser la cause animale, Alma, 2017 et Rivages, 2021). Elle s’interroge aussi sur les moteurs du changement social et sur les conditions faisant de la transition écologique un projet d’émancipation et une chance, et pas seulement un fardeau (Les Lumières à l’âge du vivant).

Parler d’espérance aujourd’hui, est-ce possible ?

Parfois, un sentiment d’impuissance face à la situation climatique et politique actuelle se fait sentir. On parle d’éco-anxiété pour traduire les émotions liées à ce sentiment de ne pas voir l’avenir, d’avoir l’impression que le pire se produira et que personne ne réagira à temps. Le risque est alors de se laisser submerger par des émotions négatives. Pourtant, l’origine de d’éco-anxiété est le désir que l’humanité soit à la hauteur des défis actuels, comme l’a montré l’auteure dans L’espérance, ou la traversée de l’impossible (Rivages, 2023). Cette noble origine (l’amour du monde et la peur pour lui) doit être soulignée ainsi que le fait que les éco-anxieux refusent le déni. Ce sont des sentinelles, pas seulement parce qu’ils avertissent des dangers, mais parce qu’ils témoignent du fait que la situation actuelle exige une remise en question profonde de nos schémas de pensée. Pour ne pas s’effondrer intérieurement, il est cependant important de s’entourer et de partager ses émotions, afin de ne pas seulement regarder ce qui ne va pas, mais d’être aussi attentif à celles et ceux qui agissent, font des choses utiles, et mettent ainsi en œuvre les idées exprimées dans Les Nourritures.

Le livre Les Nourritures est une plongée dans la pensée riche, construite et exigeante de Corine Pelluchon. Nous concluons notre échange avec une citation extraite de son ouvrage Réparons le monde. Humains, animaux, nature (Rivages, 2020) : « La prise en compte de la dimension écologique doit faire partie de toute réflexion sur la condition humaine ».

Interview : PAL et ETR

Texte : ETR

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Qui suis-je ?

 “Qui suis-je ?” 

 Je suis née le 29 décembre 1991 aux Lilas en Seine-Saint-Denis. J’ai grandi dans le sud de la Seine-et-Marne à la campagne. 

 Je suis allée  au lycée  à  Fontainebleau,  j’ai  fait  beaucoup  de  musique  et  lorsque  j’avais  quinze  ans,  j’ai  participé  au  programme  Voltaire  qui  est  un  programme  d’échange  avec  l’Allemagne.  J’ai  passé  six  mois  à  Chemnitz,  en  Saxe.  Ce  séjour  m’a  beaucoup  plu,  et  c’est  une  des  raisons  pour  lesquelles  j’ai  fait  de  l’allemand  par  la  suite.  J’aimais  bien  le  rythme  en  Allemagne,  le  fait  qu’on  aille  en  cours  pendant  quelques  heures  et que  l’on  aille après pratiquer  la  musique  au  conservatoire.  Au  lycée,  je  participais  aussi  au  chœur  des  germanistes,  donc  nous  chantions  en  allemand.  C’est  une  langue  que  j’ai  chantée  avant même de  la  comprendre.  C’est  pourquoi  apprendre  à  bien  prononcer  est  important  à  mes  yeux.  Je  crois  que  c’est  un des aspects les plus importants en langues vivantes étrangères, et l’on insiste assez peu là-dessus. 

Après le lycée, j’ai une classe préparatoire littéraire au lycée Henri IV à Paris. C’était important pour moi de conserver toutes les matières littéraires, car je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. À la fin de mon hypokhâgne, j’ai longuement hésité à choisir ma spécialité entre l’anglais et l’allemand. J’ai finalement choisi l’allemand, tout simplement parce que j’adorais le professeur d’allemand. J’ai ensuite intégré l’ENS de Lyon à l’issue de ma prépa, où j’ai commencé par faire de la recherche sur la musique. Puis, en master, j’ai commencé à travailler sur la réception de la musique sacrée en RDA et sur la figure de Bach. En M2, je suis partie en Erasmus à Dresde. J’ai fait mon mémoire sur le « Thomanerchor » de Leipzig et le « Kreuzchor » de Dresde ; ce sont deux chœurs d’enfants. Par la suite, j’ai été assistante de langue dans un lycée à Chemnitz.  Cette expérience m’a beaucoup plu et c’est d’ailleurs là que j’ai décidé que je voulais enseigner. 

Quand je suis rentrée en France, j’ai préparé l’agrégation d’allemand. L’anglais étant tout aussi important pour moi, j’ai décidé de prendre deux années sabbatiques pour être jeune fille au pair à Londres. J’ai également suivi un master de littérature comparée au « Trinity  College » à Dublin. Après ça, je suis revenue en France et je me suis inscrite en thèse à Caen. Dans mon sujet de recherche, je me suis intéressée à la biographie langagière, c’est-à-dire la place des langues en tant qu’objet littéraire affectif, autrement dit selon son itinéraire personnel.

Je me suis ensuite retrouvée à enseigner à l’université de Caen pendant trois ans.  L’année suivante, j’ai enseigné à des grands débutants en allemand à l’université Gustave Eiffel à Champs-sur-Marne. Et puis l’année d’après, je suis arrivée à la Sorbonne Nouvelle. C’est donc la première année où j’enseigne la littérature allemande et la littérature comparée dans cette université. Je me prépare en même temps au CAPES et à l’agrégation. 

Pour ce qui est de mes travaux de recherche actuels, j’ai publié un ouvrage sur l’enfant plurilingue en littérature. J’organise également un séminaire dans le cadre du congrès de l’association américaine de littérature comparée à Montréal au Québec. Je suis contente car j’ai reçu des propositions de chercheurs du monde entier qui travaillent sur le mélange des langues dans le récit de soi. 

En ce qui concerne mes loisirs, je continue de chanter à la chorale. Sinon, je joue du piano et je suis engagée dans des associations dans le domaine de la protection de l’enfance car ce sujet me tient à cœur. J’adore les chats, j’en ai beaucoup, et comme j’ai la chance d’habiter à la campagne, ils peuvent entrer et sortir de chez moi comme ils le souhaitent. 

Enfin, ce qui me plaît à la Sorbonne Nouvelle, c’est de pouvoir mêler l’enseignement et la recherche. C’est aussi la première fois qu’on me propose de faire des cours sur mes sujets de recherche. Ce que j’apprécie également, c’est que les collègues parlent de recherche entre eux. Je trouve d’ailleurs qu’ici les gens ne se prennent pas trop au sérieux, tout en se montrant quand même très intéressés et curieux. Voilà, je pense que le mot-clé, c’est la curiosité. En matière de recherche, c’est très novateur et il y a une dimension internationale très importante également. 

Annika LENK, Maxime PHELEP, Ismaël VELMIR

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Lettre de…

Rubrique : Lettre de… 

Hallo zusammen! 

Je m’appelle Martin, et j’ai une grande passion… l’Allemagne ! 

Après avoir étudié pendant trois ans pour obtenir ma licence en études interculturelles franco-allemandes à Paris 3, j’ai décidé de m’installer définitivement en Allemagne, à Brême, où je vis depuis sept mois. Lorsque j’ai commencé à étudier l’allemand, je n’avais pas « seulement » l’objectif d’apprendre quelque chose de nouveau, mais je voulais vraiment que cela devienne la nouvelle langue de ma vie quotidienne, et c’est ce qui s’est passé. 

Tout a commencé il y a deux ans, lorsque j’ai passé toute ma L2 à Berlin, qui est une grande ville dispersée, alors que Brême (qui ressemble quand même à Berlin) est plus à l’échelle humaine, tout en restant vaste et pleine d’activités intéressantes à faire… Un bon compromis ! Trouver un logement ici n’a pas été facile, mais heureusement mon copain y habitait déjà et cela m’a beaucoup aidé, sans oublier une bonne dose de patience et une grande volonté. 

L’expérience à Berlin a été intéressante et enrichissante, mais malheureusement c’était l’année du Covid et par conséquent nous sommes très peu allés à l’université : au début nous n’avions que 15 heures en présentiel par semaine (ce qui était déjà irrégulier), et à partir de janvier nous sommes passés à 100 % en distanciel. De plus, trouver un logement à Berlin est très complexe, et je me suis retrouvé à Studentendörf, une résidence universitaire inconfortable et éloignée du centre, ce qui a rendu plus difficile de faire de nouvelles connaissances et découvrir la ville. 

L’université en Allemagne est très différente de celle en France : tout d’abord, tous les domaines sont sur le même campus, il est donc immense et il faut beaucoup marcher pour trouver les salles de cours, en essayant de ne pas se perdre ! Mais cela permet de faire du sport en même temps, et on a aussi la possibilité de suivre un cours sans être obligés d’y assister et de passer des examens, mais juste pour le plaisir. L’université est pleine d’espaces verts et de détente, et d’espaces encore plus immenses où l’on peut s’arrêter pour étudier ou discuter. Quant aux cours, il était difficile de les suivre en allemand, surtout le cours de droit ; il y a à la fois des cours magistraux avec un grand nombre d’étudiants et des TD ; nous étions 400 dans le cours de droit, mais sinon nous n’étions pas nombreux dans mon département. En plus des cours, bien sûr, les examens étaient aussi principalement à distance, sauf si les professeurs demandaient des DM ; les passer dans ce mode était compliqué et stressant : les professeurs nous demandaient d’utiliser des serveurs spéciaux pour ne pas tricher, et en plus il y avait souvent des problèmes de connexion. Une autre différence avec la France est la relation entre les professeurs et les étudiants : il y a plus de distance et de « froideur », et si quelqu’un a besoin d’aide, il doit demander, on ne l’accompagne pas forcément. 

Et maintenant ? Qu’est-ce que je fais dans la vie ? Je travaille dans un restaurant à chats, pour m’introduire dans le secteur qui me fait rêver. Un jour, j’aimerais ouvrir mon propre salon de thé, unique et original, animé par de nombreux chats et enrichi de nombreux livres ; mais pas seulement : ce serait une pâtisserie française typique ici en Allemagne. 

Après ma licence de langues, j’ai réalisé ma passion et j’ai suivi une formation dans le secteur culinaire. D’ailleurs, parmi les différences culturelles qui m’ont le plus frappé entre la France et l’Allemagne, il y avait justement celles liées à la nourriture : j’ai l’impression que les Français mangent davantage pour le plaisir et le goût, alors que les Allemands ont tendance à privilégier ce qui est beau, comme les fruits et les légumes, qui sont pourtant souvent sans goût. 

Autres différences ? Les Allemands sont beaucoup plus ouverts et moins railleurs, ici il y a peu de manifestations et la vie est plus calme. En revanche, certains sujets sont tabous, comme le nazisme et la Seconde Guerre mondiale ; les événements liés à cette période historique rendent les Allemands plus pudiques sur leur histoire, alors que les Français en sont très fiers.

Ma vie est ici maintenant, et c’est ici que j’imagine mon avenir personnel et professionnel ; avoir l’opportunité de vivre et de connaître deux pays, deux langues et deux cultures très différentes, bien que proches géographiquement, est une expérience stimulante et enrichissante, que je recommande vivement à tous ceux qui en ont l’envie et la volonté. 

A bientôt, peut-être dans mon salon de thé avec les chats ! 

Viele Grüße aus Bremen! 

                                                                                – Martin 

CAM

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Livres

Compte-rendu de lecture du n°18 : « Les politiques linguistiques et la langue de la politique : l’allemand et le kiswahili dans l’Afrique Orientale Allemande, 1885-1918. », Kyra Levine.

Thèse dirigée par le Prof. Dr. Andreas Eckert (Humbold-Universität zu Berlin) et la Prof. Fr. Céline Trautmann-Waller (Université Sorbonne Nouvelle). Soutenue le 7 décembre 2015 par Kyra Levine.

Dans sa thèse en Histoire soutenue en 2015 à l’Université Sorbonne Nouvelle, Kyra Levine s’attelle à un sujet passionnant mais largement méconnu : le choix du kiswahili comme langue administrative et d’instruction dans l’Afrique Orientale Allemande (Deutsch Ostafrika). 

Le kiswahili est la langue africaine la plus enseignée dans le monde, langue véhiculaire en Afrique de l’Est, langue de travail de l’Union africaine. C’est une langue bantoue dont les locuteurs se concentrent en Ouganda, au Kenya, en Tanzanie, à l’île de Zanzibar et aux Comores, sans oublier au Rwanda, au Burundi, en Somalie, en Zambie et en Afrique du Sud. Née du brassage des populations littorales commerçant avec le golfe arabo-persique et l’Inde, son extension a été favorisée par plusieurs facteurs. D’une part, la traite des esclaves a fait du kiswahili la langue des négriers se déplaçant entre la côte et les terres, contribuant à sa diffusion. D’autre part, les Etats nouvellement indépendants de la Tanzanie (1961) et du Kenya (1963) ont voulu concurrencer l’anglais et construire une nation autour de leur langue propre et prestigieuse, le kiswahili.

L’expansion de l’aire linguistique swahilie tient également aux politiques linguistiques de l’administration coloniale allemande de la région. Les colonies allemandes sont nées d’initiatives d’individus portés par le projet de créer des colonies de peuplement allemandes ; ils craignaient en effet que les nombreux Allemands émigrant vers le continent américain perdent leur « germanité »  en s’assimilant à la culture de leur pays d’accueil. Otto von Bismarck, chancelier du Deuxième Reich entre 1871 et 1890, cerveau de la politique intérieure et étrangère du nouvel Etat, dut néanmoins composer avec les lobbys en faveur de la colonisation, menés par des personnages excentriques, comme Carl Peters. Le chancelier ne souhaitait initialement pas créer des colonies outre-mer, car elles seraient un poids économique considérable pour une Allemagne qui s’industrialisait lentement et une source de tensions probable avec la Grande-Bretagne, qui voulait contrôler l’Afrique du Caire au Cap. Carl Peters, aventurier et membre d’un club prônant la création de colonies de peuplement, alla néanmoins de l’avant : il fit signer dès 1884 des contrats de cession de territoire à des chefs de la côte au nom du gouvernement allemand et mit Bismarck devant le fait accompli. Celui-ci voulut brider Peters et mit les nouveaux territoires allemands sous le contrôle de la Deutsch-Ostafrikanische Gesellschaft, la Compagnie de l’Afrique Orientale Allemande, créée à l’occasion en 1887. Un soulèvement d’ampleur l’année suivante entraîna la prise en main de la colonie par le gouvernement allemand, qui envoya alors des administrateurs sur place. L’administration coloniale dans toutes les colonies allemandes se caractérisa par une forte autonomie locale, due à une décentralisation et à l’absence de politique globale impulsées par Berlin. Ainsi, tandis que le général Lothar von Trotha, qui faisait face à des résistances de la part des populations des Hereros et des Namas dans la colonie Deutsch Südwestafrika (l’actuelle Namibie), ordonna l’extermination de ces peuples (1904-1908), le gouverneur de Samoa entre 1900 et 1912, Wilhelm Solf adopta les coutumes locales de l’île. La marge de manœuvre des gouvernants locaux était donc grande.

La politique linguistique des autorités locales en Afrique orientale allemande peut paraître surprenante aux lecteurs et lectrices contemporaines : là où les empires coloniaux français et britannique privilégiaient la langue métropolitaine dans l’administration de leurs colonies et l’instruction des colonisés, le choix des gouverneurs allemands de la Deustch Ostafrika se porta sur le kiswahili. Ils étaient en effet démunis face à la multiplicité des langues parlées en Afrique de l’Est, et ils considéraient le kiswahili comme la langue d’une civilisation plus « avancée » que ses voisines, en raison de son cosmopolitisme et ses productions littéraires. Un nationalisme sous-jacent est aussi à l’œuvre dans cette stratégie, puisque les colons gardaient le monopole de la langue allemande, contribuant ainsi à les séparer clairement des colonisés, car certains Allemands craignaient une Verkafferung, une dégénération de la soi-disant pureté allemande au contact des populations indigènes. Enfin, les Allemands ne prétendaient pas être porteur d’une quelconque « mission civilisatrice » qui imprégnait le discours colonial français ; leur but était d’exploiter le plus efficacement possible la main-d’œuvre locale, en s’assurant qu’ils connaissaient tous la même langue. 

Cette politique linguistique n’alla pas sans susciter de résistances de la part de missionnaires préférant l’enseignement des langues tribales, moins « islamisées » que le kiswahili, et de patriotes enthousiastes. Elle fut aussi un outil dont les colonisés tirèrent profit. En effet, le système éducatif en kiswahili favorisa la création d’une classe moyenne et d’une bourgeoisie africaine éduquées, dont la conscience nationale se développa progressivement et joua un rôle clé dans la création du nouveaux Etats-nations. 

En effet, après sa défaite lors de la Première Guerre Mondiale, l’Allemagne dut céder ses colonies à ses vainqueurs : la Deustch Ostafrika fut divisée entre les Belges, qui s’emparèrent du Rwanda-Urundi, le Portugal, qui obtint la région du Kionga, et les Britanniques, qui reçurent le reste qu’ils baptisèrent Tanganyika ; l’archipel de Zanzibar obtint le statut de protectorat, soit le maintien du gouvernement local, combiné à la mainmise britannique sur la politique étrangère et militaire. Le Tanganyika obtint son indépendance en 1961, le Zanzibar s’émancipa en 1963 de la tutelle britannique ; en 1964, les deux nouveaux Etats, ainsi que leurs noms, fusionnèrent pour former la Tanzanie. Le premier président tanzanien Julius Nyerere, au pouvoir entre 1964 et 1985, s’appuya tout particulièrement sur le kiswahili pour consolider ce nouvel Etat-nation, dont le modèle théorique suppose une cohésion de ses citoyens autour d’une identité commune. 

La thèse de Kyra Levine a le mérite de mettre en en lumière un pan méconnu de l’histoire coloniale allemande et de l’histoire du kiswahili. Car la période 1885-1918 est charnière pour comprendre le temps de la décolonisation et l’instauration d’Etats-nations dans la région Est-Africaine. En outre, l’histoire coloniale allemande amène à s’interroger sur les formes prises par le colonialisme allemand. La redécouverte du génocide des Herero et des Namas entraîna une réflexion sur les violences d’Etat perpétrées à large échelle, répétées avec l’Holocauste. En outre, les entreprises coloniales allemandes extra-européennes ne doivent pas faire oublier que l’Allemagne était un empire continental bien avant de s’aventurer outre-mer, que ce soit sous la forme du Saint-Empire-Romain Germanique, dissous en 1806, ou du Deuxième Reich (1871-1918). L’aspiration à l’expansion allemande, dans des buts de puissance, de prospérité ou de sécurité, visait autant les territoires d’Europe centrale que l’outre-mer. La Weltpolitik, soit l’acquisition de colonies extra-européennes grâce à une puissante force navale, et la Ostpolitik, soit la perception que la région de Mitteleuropa était l’espace impérial allemand, étaient donc intimement liées.

Kyra Levine procède de manière progressive et rigoureuse. Après avoir mis en contexte le colonialisme allemand, elle s’interroge sur l’usage imposé du kiswahili dans l’administration et dans l’éducation. Elle se tourne ensuite vers l’usage qu’en ont fait les colonisés. Enfin, elle fait le point sur les conséquences de l’emploi généralisé du kiswahili dans la période suivant la domination allemande. Pour ce faire, elle a minutieusement épluché de nombreuses archives à Berlin et à Dar es Salaam, des sources qui émanaient notamment de l’administration de la colonie d’Afrique orientale allemande : des décrets administratifs, des lois, des mémorandums, des transcriptions de réunions, des programmes éducatifs. Elle s’est heurtée à la multiplicité et l’autonomie des autorités allemandes, édictant des décrets ponctuels au gré des circonstances, rendant difficile de donner une vue d’ensemble de la situation. Elle parvient néanmoins à mettre en lumière, de manière synthétique et claire, les politiques linguistiques à l’œuvre dans l’Afrique orientale allemande, leurs enjeux, et leur portée.

THG

Sources iconographiques

  • https://www.axl.cefan.ulaval.ca/monde/swahili.htm
  • https://de.wikipedia.org/w/index.php?curid=5967467 
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Rencontre au Stammtisch 

Le mardi 17 octobre, une des deux élèves responsables de la rubrique « Sur le Vif » est allée à la rencontre des étudiants de licence, master et préparant l’agrégation en études germaniques, mais aussi venus d’autres départements (notamment via le théâtre franco-allemand). Ils se sont retrouvés à l’Avenue Café, au 19 avenue Philippe Auguste dans le 11ème arrondissement pour un certain évènement : le Stammtisch, organisé par Jonas Meir et Helene Schreilechner (professeurs pour 5 ans par le Deutscher Akademischer Austauschdienst). Le Stammtisch, c’est ce concept germanophone qui se concrétise par la rencontre d’étudiants autour d’un verre et dans le cas présent, de conversations en allemand et en français. Cette initiative, dans un bar assez spacieux, aux prix raisonnables et cette soirée-là très rempli, comble le souhait de certains étudiants de se rencontrer et est à la base une initiative de l’association Pierre-Berteaux. On peut choisir de venir pour de multiples raisons : rencontrer d’autres étudiants du département, qui s’intéressent à l’Allemagne, socialiser (car en cours on peut manquer de contact), ou encore parler allemand. Cela reste une bonne occasion si on ne prend pas l’initiative au quotidien.

MAP

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Le théâtre franco-allemand

Le département d’études germaniques propose un cours de théâtre franco-allemand auquel les étudiant·e·s peuvent participer en UE libre (avec une note) ou bien en loisir, rien que pour le plaisir et pour pratiquer l’allemand à l’oral. Cette année, les cours de théâtre sont organisés par Jonas Meir et Helene Schreilechner.

Une étudiante inscrite au théâtre et qui va régulièrement à cet atelier a eu la gentillesse de raconter son expérience, ce qui nous permet de vous présenter une séance-type de théâtre franco-allemand.

Chaque séance commence par des jeux d’échauffement qui mobilisent les étudiant·e·s et les font interagir. Souvent, l’accent est mis sur le ressenti du corps (das Körpergefühl) et l’étudiant·e apprend à définir ses émotions et à se mettre dans un autre état d’esprit pour pouvoir jouer différentes émotions.

Ensuite, les étudiant·e·s passent à l’improvisation. En général, ils et elles reçoivent des textes en allemand qu’ils et elles analysent puis jouent en improvisation en allemand.

Si cela vous intéresse de faire de l’improvisation théâtrale en allemand et de rencontrer d’autres étudiant·e·s du département d’études germaniques (licences et masters), n’hésitez pas à vous inscrire !

MOJ

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Bouchon Dossier numéro 18

Le Bouchon – 17 novembre 2023

Le 17 novembre de 10 h 30 à 12 h eut lieu le Bouchon de la 18ème édition de la revue des germanistes en salle B115, autour d’un brunch réunissant le comité de rédaction de la revue, mais aussi d’anciens membres des 16ème et 17ème rédactions et des étudiants de master avec leur professeure. Avant tout symbolique, puisque la remise du bouchon représente le passage d’une rédaction à une autre, cet évènement nous a permis de nous retrouver entre étudiants germanistes autour d’un buffet divers et riche, à l’image du thème de la rédaction de cette année. La remise du bouchon était un moment privilégié pour discuter en dehors des cours avec nos professeurs, mais aussi avec d’anciens étudiants des rédactions n° 16 et n° 17 ; ceux-ci nous ont partagé de précieux conseils et de multiples expériences pour parfaire la construction de la nouvelle rédaction de cette année. De plus, étant tous dans cette rédaction en troisième année d’études, le Bouchon était l’occasion de rencontrer des étudiants en master accompagnés de leur professeure qui nous ont expliqué leur formation, autour de nourriture et surtout de rires.

MAP

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Qui suis-je?

Je suis née le 29 décembre 1991 aux Lilas en Seine-Saint-Denis. J’ai grandi dans le sud de la Seine-et-Marne à la campagne.

Je suis allée au lycée à Fontainebleau, j’ai fait beaucoup de musique et lorsque j’avais quinze ans j’ai participé au programme Voltaire qui est un programme d’échange avec l’Allemagne. J’ai passé six mois à Chemnitz en Saxe. Ce séjour m’a beaucoup plu, et c’est une des raisons pour lesquelles j’ai fait de l’allemand par la suite. J’aimais bien le rythme en Allemagne, le fait qu’on aille en cours pendant quelques heures et qu’après on aille faire de la musique au conservatoire. Au lycée je participais aussi au chœur des germanistes, donc nous chantions en allemand. C’est une langue que j’ai chantée avant de la comprendre. C’est pourquoi apprendre à bien prononcer est important à mes yeux. Je crois que c’est un des aspects les plus importants en langues vivantes étrangères et on insiste assez peu là-dessus.    

Après le lycée j’ai intégré une classe préparatoire au lycée Henri IV à Paris. C’était important pour moi de conserver toutes les matières littéraires car je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire.  A la fin de mon hypokhâgne, j’ai longuement hésité à choisir ma spécialité entre l’anglais et l’allemand. J’ai finalement choisi l’allemand, tout simplement parce que j’adorais le professeur d’allemand. J’ai ensuite intégré l’ENS de Lyon à l’issue de ma prépa où j’ai commencé par faire de la recherche sur la musique. Puis, en master, j’ai commencé à travailler sur la réception de la musique sacrée en RDA et sur la figure de Bach. En M2, je suis partie en Erasmus à Dresde. J’ai fait mon mémoire sur le « Thomanerchor » de Leipzig et le « Kreuzchor » de Dresde : deux chœurs d’enfants. Par la suite, j’ai été assistante de langue dans un lycée à Chemnitz. Ça m’a beaucoup plu et c’est d’ailleurs là que j’ai décidé que je voulais enseigner.

Quand je suis rentrée en France j’ai préparé l’agrégation d’allemand. L’anglais étant aussi important pour moi, j’ai décidé de faire deux années sabbatiques pour être jeune fille au pair à Londres. J’ai également fait un master de littérature comparée au « Trinity College » à Dublin. Après ça, je suis revenue en France et je me suis inscrite en thèse à Caen. Dans mon sujet de recherche je me suis intéressée à la biographie langagière, c’est-à-dire à la place des langues en tant qu’objet littéraire affectif, autrement dit quelle est la place des langues dans un itinéraire personnel.

Je me suis ensuite retrouvée à enseigner à l’université de Caen pendant trois ans. L’année suivante j’ai enseigné à des grands débutants en allemand à l’université Gustave Eiffel à Champs-sur-Marne. Et puis l’année d’après, je suis arrivée à la Sorbonne-Nouvelle. C’est donc la première année où j’enseigne la littérature allemande et la littérature comparée dans cette université. Je me prépare aussi au CAPES et à l’agrégation.

Pour ce qui est de mes travaux de recherche actuels, j’ai publié un ouvrage sur l’enfant plurilingue en littérature. J’organise également un séminaire dans le cadre du congrès de l’association américaine de littérature comparée à Montréal au Québec. Je suis contente car j’ai reçu des propositions de chercheurs du monde entier qui travaillent sur le mélange des langues dans le récit de soi. 

En ce qui concerne mes loisirs, je continue de chanter à la chorale. Sinon je joue du piano et je suis engagée dans des associations dans le domaine de la protection de l’enfance car ça me tient à cœur. J’aime aussi beaucoup les chats, j’en ai plein, et comme j’ai la chance d’habiter à la campagne, ils peuvent entrer et sortir comme ils le souhaitent.

Enfin, ce qui me plaît à la Sorbonne-Nouvelle c’est de pouvoir mêler l’enseignement et la recherche. C’est aussi la première fois qu’on me propose de faire des cours sur mes sujets de recherche. Ce que j’aime également, c’est que les collègues parlent de recherche entre eux. Je trouve aussi que les gens ici ne se prennent pas trop au sérieux, tout en étant quand même très intéressants et curieux. Voilà, je pense que le mot-clé c’est la curiosité. En matière de recherche c’est très novateur et il y a une dimension internationale qui est très importante aussi. 
ANL, MXP et ISV

Revue n°17

Chaque année, la rubrique “qui suis-je” nous réserve une devinette des plus sympathiques.

A vous de jouer ! Jetzt sind sie dran !

Je suis née en Normandie dans la petite ville d’Alençon, dans l’Orne en 1975. J’ai commencé l’allemand de façon assez classique en 6e  : c’était ma LV1. C’était pour mes parents la façon d’être dans la bonne classe du collège. C’était plutôt par hasard donc, mais j’en ai fait jusqu’au bac, en 1992. 

Au début, l’allemand n’était pas du tout une vocation. J’ai eu un professeur d’allemand au lycée qui nous faisait travailler surtout avec des phrases à traduire, cela manquait de vivant. Je me souviens particulièrement de la chute du mur : j’étais en classe de seconde en novembre 89, on n’en a quasiment pas parlé, on a juste continué la grammaire, les traductions, comme si de rien n’était. Je me suis dit que c’était bizarre d’enseigner une langue vivante ainsi, alors qu’un événement planétaire avait lieu dans le pays dont on apprenait la langue. A l’époque, je n’étais pas très motivée, c’était vraiment très vieux jeu comme méthode d’enseignement. 

Après le bac, je suis venue à Paris en hypokhâgne au lycée Lakanal à Sceaux. C’est là que j’ai  eu une prof d’allemand incroyable, Madame Lafond, que je n’oublierai jamais, qui m’a fait apprécier l’allemand à sa juste valeur. En khâgne, j’ai choisi l’allemand comme spécialité ; j’ai fait deux khâgnes : une au lycée Lakanal et une autre au lycée Henri IV où j’ai décidé de continuer l’allemand. Je suis entrée après à l’ENS, l’Ecole Normal Supérieure par le concours en science sociale et en parallèle,  j’ai fait Sciences Po Paris. Mon projet était de travailler pour la Commission européenne et j’ai continué l’allemand dans cet esprit.

Pendant mes études, je suis partie un an à Leipzig de 1997 à 1998. C’est une année qui m’a beaucoup marquée. Pas très longtemps après la réunification, il y avait encore beaucoup de traces de la RDA, et j’ai beaucoup aimé parler avec les gens de leurs expériences et de leur quotidien. Tout ça n’avait rien avoir avec ce qu’ on m’avait appris dans les livres d’histoire sur la RDA. Les cours étaient très riches. J’étais en plus étudiante en échange avec l’ENS donc je pouvais choisir les cours que je voulais : en science politique, en sociologie et plein d’autres matières. Ça m’a donné envie de faire de la recherche sur la RDA, sur la suite des évènements et les mécanismes de transition. Quand je suis rentrée de Leipzig, j’ai passé l’agrégation. 

Ce qui m’a motivé à être professeure c’est la double dimension d’enseignant en France : être professeur va de pair avec la recherche. J’avais déjà commencé à donner des cours particuliers de français en Allemagne, à Erfurt. J’aimais aussi expliquer et transmettre.

Je n’ai jamais cessé d’être liée d’une façon ou d’une autre à la Sorbonne Nouvelle comme étudiante, même quand j’étais en hypokhâgne. J’y ai fait mon DEA et ma thèse, puis j’ai été recrutée comme assistante en AMN (c’est un contrat doctoral et ensuite comme maître de conférences). 

Avant d’être professeure et de faire de la recherche, j’avais fait des stages : un stage au conseil de l’Europe à Strasbourg pendant 3 mois. Mais c’était très administratif et le rôle du conseil de l’Europe est d’abord consultatif. Je ne voyais pas assez le résultat et me suis tournée vers un autre domaine. J’ai également un stage TV5 Monde car je voulais voir comment les médias fonctionnaient. C’était plus intéressant, mais l’information était maniée de façon trop légère à mon goût. Creuser les choses en profondeur ne me correspondait plus.

Actuellement, je suis maître de conférences à la Sorbonne Nouvelle. Je dirige le département d’études germaniques depuis septembre : ça implique l’enseignement, la recherche et pas mal de tâches administratives diverses comme s’occuper des liens avec les autres départements. Et en parallèle je fais passer le concours de l’agrégation. 

En tant que professeure, j’enseigne surtout l’histoire de l’Allemagne, la civilisation allemande au XXe siècle et au XXIe siècle. J’enseigne aussi la traduction et l’actualité dans le master de journalisme de transnationale et en master MEEF pour préparer les étudiants aux métiers d’enseignements. J’ai aussi enseigné un court moment à Paris 12, j’ai enseigné à la fac en Allemagne à Erfurt mais c’est plutôt quand même l’exception. J’enseigne très peu en dehors. 

J’ai choisi ces spécialités d’enseignements car l’histoire peut se raconter de différentes façons. Quand j’étais à Leipzig on se concentrait plus sur l’histoire des pratiques sociales, une égalité femme-homme pensée différemment. Les sujets sont très diversifiés. J’avais envie d’apporter ma pierre, le travail en archive ne me fait pas peur, ça me plait même.

En tant que chercheuse, j’ai publié plusieurs articles, des monographies. Je suis en train de préparer une publication sur les institutions de RDA et dont une, la maison berlinoise du travail culturel. Elle s’occupait d’organiser les collectifs artistiques dans les entreprises car l’art ouvrier était très encouragé en RDA. J’ai aussi publié récemment un ouvrage bien plus général en Allemagne qui s’appelle la RDA après la RDA. C’est une recherche sur la RDA aujourd’hui dans les mémoires familiales, dans la littérature, dans les romans, des récits de vie autobiographiques, biographiques. Ce qui est sûr, c’est que je ne changerais pas de métier de si tôt. 

A propos du sujet de la revue, on voit des côtés positifs. Je fais partie du comité de rédaction d’une revue, on peut se connecter à distance pour la réunion. Certaines réunions, comme en hybride, sont très pratiques, on est plus nombreux à chaque fois. D’un autre côté, je sens une grande saturation des cours en distanciel avec certains étudiants derrière l’écran. J’ai réalisé que le métier d’enseignant ne se portait pas au distanciel. Ça change la nature de l’enseignement. On peut bien sûr enregistrer des cours et les étudiants écoutent chez eux mais ça ne pourra remplacer jamais quoique ce soit, c’est juste un complément. Les inconvénients sont beaucoup plus lourds que les avantages. 

Quant au phénomène de FOMO, ça me concerne indirectement, je vois ça chez mes enfants adolescents. Personnellement, je n’ai pas peur de rater des choses : je suis sur les réseaux sociaux, j’ai un compte Instagram et un compte Facebook mais j’utilise ces réseaux sociaux qu’avec les gens que je connais dans la vraie vie. Ce n’est pas l’utilisation classique des réseaux sociaux. Mais mes enfants ont du mal comme tous ceux de leurs générations à quitter les écrans. Il y a une addiction très forte et j’essaie de lutter comme je peux mais de façon peu convaincante. On a beau savoir que ce sont des algorithmes faits pour rendre addicts, la machine a une emprise très forte : elle est faite pour ça, et le recul n’est pas très grand. Comme je suis d’une génération plus ancienne ça ne me concerne moins directement, c’est surtout par l’intermédiaire de mes enfants que je vis ça.  

Avec toutes les infos que je vous ai données, trouver qui je suis n’est plus qu’un jeu d’enfant. 

CN, JQG

Revue N°16

Nous vous retrouvons une nouvelle fois pour l’incontournable rubrique du Qui suis-je ? Dans le contexte actuel, chacun aspire à une sortie de crise différente et à un monde d’après utopique. Notre mystérieux qui suis-je en fait partie lui aussi. Un seul mystère à élucider dans ce numéro, détectives à vous de jouer ! Viel Spaß! Je suis née en France en 1972, donc je ne suis pas de nationalité allemande mais mon intérêt pour cette langue est grand. Mon histoire avec l’allemand commence en collège, au départ ce n’est pas le grand amour. Ma mère travaillait dans une entreprise allemande et avait commencé́ à prendre des cours du soir en allemand, elle m’a donc conseillé de choisir allemand au collège de sorte à pouvoir m’aider. J’étais très bonne élève et à cette époque on prenait allemand quand on était bon, alors pourquoi pas. Les débuts ont été difficiles… Les trois premières leçons étaient orales et sans texte, pour faire simple je ne comprenais absolument rien. Je me souviens d’une écoute qui parlait d’un père qui perdait sa pipe, sa fille Gisela la retrouva et le père disait « das ist aber nett von dir », et moi ce que je comprenais c’était « savonnette ». Au lycée toujours pas de coup de foudre, on peut même dire que ça empire quelque peu : pendant 3 ans j’ai la même professeure, elle est la caricature de la professeure d’allemand sévère et axée sur la grammaire. Mais finalement ça m’a aidé à comprendre comment la langue fonctionnait, j’ai mieux compris la structure de la langue, donc avec le recul je suis contente ! Après le lycée direction la classe préparatoire, mais ce que je voulais vraiment faire c’était de l’histoire- géographie. J’en ai parlé à un professeur de prépa duquel je respectais l’avis, et il m’a dit que ce n’était pas une excellente idée. Alors vu que j’étais forte en allemand et que j’avais découvert la traduction en classe préparatoire, je me suis dis que j’allais tenter ma chance en allemand : mission accomplie puisque je réussis mon deuxième essai au concours de l’ENS en 1993. J’ai toujours voulu être professeure depuis l’enfance, je me souviens encore de positionner mes poupées devant moi et de leur donner cours dans ma chambre. J’ai toujours aimé apprendre et j’étais curieuse. Alors on peut dire qu’aujourd’hui j’ai atteint mon objectif, je donne entre autres des cours de traduction à la Sorbonne Nouvelle et je suis aussi bien linguiste de l’allemand que du français. Et ce n’est pas tout ! Le contact avec autrui qui me plaît tant, je le retrouve lui aussi avec les étudiants et les collègues de travail. Je touche donc à tous les domaines qui m’intéressent : la traduction et le contact avec les autres, mais aussi les responsabilités, l’administratif, l’enseignement, la recherche. Mais avant tout ça j’ai connu un parcours qui n’était pas linéaire, je suis passée par une licence, un master, deux DEA, une thèse en étant normalienne, je me suis arrêtée une année pour des raisons de santé, j’ai été un moment élève à l’ENS alors que j’avais déjà mes deux DEA, j’ai commencé ma thèse assez tard, j’ai envisagé un moment de faire sciencepo, j’ai tenté deux fois l’ENA,… J’ai même été deux ans assistante de langue française en Autriche, c’était une super expérience ! L’Autriche est encore rurale et attachée aux traditions, alors ils faisaient beaucoup la fête et m’emmenaient partout parce que j’étais la petite française ! Bon ça n’a pas été tout rose, l’inconvénient c’étaient les dialectes. Petite anecdote, je logeais chez la secrétaire de l’établissement où j’enseignais, un jour elle n’était pas là et arrive un ramoneur qui ne parait que le dialecte… Je ne comprenais rien, je lui ai demandé gentiment de répéter plusieurs fois mais impossible de comprendre quoi que ce soit. Je lui ai expliqué que j’étais pressée et je suis partie dans ma voiture où j’ai fondu en larmes me disant que jamais je n’allais y arriver, que je ne comprenais rien. Pareil lorsque je sortais avec des collègues, en début de soirée ils parlaient allemand mais plus on avançait dans la soirée plus ils se mettaient à parler leurs dialectes et je ne comprenais plus rien. De plus, là bas tout le monde à un dialecte différent c’est fou. Mais dans l’ensemble c’était une très bonne expérience, je ne regrette pas du tout au contraire. Le gros point fort c’est que des collègues m’ont trouvé sympathique et studieuse, et pendant qu’elles corrigeaient leurs copies elles me laissaient donner réellement cours à leurs classes ! Ça m’a beaucoup servi puisqu’à l’époque il n’y avait pas de formations pour les enseignants- chercheurs, on sautait tout de suite dans le grand bain en donnant cours sans avoir pu vraiment s’y préparer en quelques sortes. En bref malgré le fait que j’ai essayé plusieurs fois de changer de direction, j’en suis toujours revenu à mon rêve d’enfant. Finalement je ne me voyais pas travailler ailleurs que dans la fonction publique. Je pense que j’ai trouvé ce qui me convient !

Je connais bien la Sorbonne Nouvelle maintenant, j’ai d’abord fait ma thèse ici pendant 5 ans en tant que fonctionnaire stagiaire. D’ailleurs j’ai été la première doctorante de Mme Behr ! Elle découvrait ce que c’était d’encadrer une thèse et moi je découvrais ce que c’était d’en écrire une ! Je connais donc l’endroit depuis une vingtaine d’années, j’y suis attachée, ce qui peut aussi expliquer mes différents engagements dans la fac. Pourtant je n’ai pas connu que la Sorbonne Nouvelle, j’ai aussi été un an à Nancy, deux ans à Reims et une année à Paris Diderot, avant de revenir ici. J’ai donc pu voir comment fonctionnaient d’autres universités. Mais l’ambiance familiale que je connais ici, je ne la retrouverai pas ailleurs. Pareil pour la qualité de travail ! Puis on m’a proposé le poste de Vice-présidente du Développement durable et de la Qualité de vie au travail et j’ai accepté́ . Ce poste porte sur les questions de développement durable, responsabilité sociale ou sociétale; l’idée est de verdir les conditions de travail et l’environnement. Je m’occupe également de la labélisation du nouveau campus à Nation, construit selon des normes « haute qualité environnementales ». Je suis réellement épanouie dans mon travail, en aucun cas je ne souhaiterais quitter mes postes ou changer de lieu de travail, l’ambiance familiale et joviale de l’ancien campus d’Asnières est toujours présente et les liens forts qui se sont tissés au fil des années font parties des choses qui me rattachent à l’Université. J’ai également été directrice du département pendant deux ans et j’ai cédé ma place à Mme Lauterwein en 2019. Le poste change régulièrement d’occupant pour que tout le monde puisse occuper la fonction à un moment. Cela permet de mieux comprendre l’université et de rencontrer d’autres personnes, sinon on peut facilement se retrouver isolé. Comment j’imagine cette possible sortie de crise ? Dans un monde utopique, j’aimerais me réveiller en me disant que ce n’était qu’un mauvais rêve et que tout redevienne normal. J’aimerai en réalité pouvoir appuyer sur un bouton et que tout s’arrête. Ce que je ne souhaite pas retrouver dans mon monde utopique, c’est la circulation et les façons de se déplacer d’avant la crise. Les pistes cyclables se sont également développées et je trouve ça vraiment bien, ça me rappelle l’Allemagne. Ce qui est des choses que je souhaite retrouver, les pauses café et les discussions après les cours et les réunions en présentiel. Je suis une femme passionnée et passionnante Maintenant c’est à vous de deviner qui je suis… JKR, EEN

Revue n°15

La pandémie rend parfois généreux. Nous avons commencé l’année avec deux rédactions, une bleue et une orange, et aucune des deux ne se voyait faire l’impasse sur la rubrique du Qui suis-je ?. Les rédactions ont certes fusionné ensuite, lors de la période du travail à distance. Mais nous ne sommes pas revenus sur le dédoublement de la rubrique. Vous aurez donc dans ce numéro deux énigmes à élucider. Viel Spaß! QUI SOMMES-NOUS ? Née en 1969, ni en France, ni en Allemagne, mes parents ont zigzagué entre des régions germanophones et francophones. C’est pourquoi je suis bilingue et que j’ai connu 12 systèmes scolaires successifs. Enfant, je voulais devenir soit institutrice, soit agricultrice biologique. On peut dire que l’un de ces objectifs est presque atteint. À Münster, en Westphalie, j’ai fini par passer un Abibac dans un lycée franco[1]allemand. C’est dans la même ville que j’ai également commencé des études de philosophie, de germanistique et de sociologie. À l’époque, le système voulait que tous les étudiants de tous les niveaux suivent les séminaires ensemble. C’était très impressionnant et cela me plaisait beaucoup. A Paris, j’ai d’abord fait une école de journalisme, puis une maîtrise franco-allemande à la Sorbonne Nouvelle. Je me souviens bien d’une pièce de théâtre que nous avions montée avec d’autres étudiant.e.s, une comédie musicale écrite et réalisée, en marge des cours. C’était une pièce bilingue qui avait pour titre « Pourquoi faire simple, quand on peut faire franco-allemand » ! Nous avons ensuite pu jouer dans un petit théâtre parisien. Les arts plastiques sont une autre de mes passions, raison pour laquelle j’ai poursuivi une formation artistique et d’histoire de l’art en même temps. Au total j’aurai mis 9 ans pour finir ma thèse ! Je ne le regrette pas, car ce temps était nécessaire pour l’incubation de ma recherche. Et puis j’ai fini par en tirer trois livres. J’ai longtemps poursuivi des activités artistiques et journalistiques en parallèle, mais je suis heureuse aujourd’hui d’avoir finalement choisi l’enseignement. C’est un métier qui a du sens. Après y avoir étudié, j’ai eu la chance d’enseigner à la Sorbonne Nouvelle dès la fin des années 1990, en tant qu’ATER, plus tard j’ai été titularisée. C’était en 2010. À l’époque, le département d’études germaniques était encore un institut situé en proche banlieue, dans la ville d’Asnières. L’atmosphère entre étudiants et professeurs était très conviviale. Le bâtiment, un préfabriqué des années 1970, était entouré d’espaces verts, avec des rosiers, des magnolias. En été, on y faisait même des barbecues ! Nous n’avions pas de problèmes de salles et d’emplois du temps, il y avait de la place pour tout le monde. Au moment de quitter Asnières en juin 2012, nous avons organisé une fête avec les étudiants et fondé l’Association alumni Pierre Bertaux. Nous devons le nom de notre revue, asnieres-a-censier, à une citation tirée d’un discours de Valérie Robert, qui était alors directrice. Tout comme l’université de Vincennes s’est installée à Saint[1]Denis en espérant qu’elle garderait son âme rebelle (d’où l’expression « Vincennes à Saint-Denis »), nous nous sommes jurés de garder l’esprit d’Asnières en arrivant à Censier. Après l’emménagement dans le Quartier Latin, l’identité presque familiale du département a été un peu dissoute dans la masse, il faut l’avouer, même si en rejoignant Censier notre offre de cours s’est aussi beaucoup diversifiée. Aujourd’hui, ce que je préfère enseigner, c’est la poésie du 20e siècle, l’histoire de l’art, les problèmes posés par l’intermédialité et l’interculturalité. J’apprécie beaucoup le travail et les échanges avec les étudiants, et j’espère qu’ils et elles garderont un bon souvenir de leurs études malgré les conditions très particulières de la pandémie. Qui suis-je ?
Propos recueillis par LB

Je suis arrivée en France avec mes parents en hiver 1986. Venant d’un pays du Sud, je restais bouche bée face à la neige toute blanche et glaciale qui couvrait les rues de Paris. Je n’avais à l’époque que six ans, c’était donc une période assez courte que j’avais passé dans mon pays natal. Quand j’y voyage maintenant, c’est plutôt en touriste. J’ai toujours été intéressée par la pédagogie et la formation, ce qui m’a assez tôt amenée à m’engager dans ces domaines. À l’école, dans le cadre des tutorats, j’aidais les petits qui étaient dans leur première année de collège. Étudiante, je donnais des cours à des collégiens. De plus, j’ai réalisé plusieurs missions de bénévolat auprès de jeunes adolescents ayant des handicaps physiques ainsi que mentaux. Après avoir obtenu un bac médico-social, j’ai commencé une année d’université à Nanterre. L’université gigantesque ne me plaisait pourtant pas vraiment, je m’y sentais assez perdue et j’avais envie d’être active et de me sentir utile plus vite. C’est pourquoi j’ai commencé une formation d’assistante de direction. La formation achevée, je travaillais dans des domaines très différents comme par exemple dans la protection de l’enfance ainsi que dans la formation professionnelle. Il va sans dire que l’ambiance de travail dans un foyer éducatif n’est pas du tout comparable à celle dans une entreprise. Du monde de l’entreprise, je me suis pourtant assez vite éloignée. Le contact humain et l’aspect pédagogique qui m’inspirent et dont j’ai besoin afin d’être bien dans mon travail m’y manquaient. En 2012, j’ai postulé à un poste d’assistante de direction aux ressources humaines à la Sorbonne Nouvelle. J’ai finalement obtenu un poste au département d’études germaniques, qui était dans un grand désarroi administratif. Aujourd’hui j’en suis très heureuse, j’apprécie avant tout la dimension humaine du département et l’ambiance familière rendant le travail agréable. Au département, je suis responsable du suivi et de l’accompagnement des étudiants dans leurs études, c’est-à-dire des inscriptions, de la gestion des notes, des emplois du temps et du suivi et de la transmission des informations. La gestion des enseignants et la formation des nouveaux collègues entrent également dans mon domaine de compétences. Mon engagement n’est toutefois pas limité au seul département d’études germaniques. En tant qu’élue et membre du bureau de la Commission de la Formation et de la Vie Universitaire (CFVU), je travaille dans celui des conseils centraux de l’université qui décide des grandes orientations pédagogiques de notre université. Maintenant c’est à vous de deviner ! Qui suis-je ?
Propos recueilli par EK

Revue n°12

Depuis mon adolescence, je m’oriente vers un parcours universitaire. Je suis sûr de ma volonté : je souhaite devenir chercheur – mais certainement pas en littérature, histoire ou politique.
Né dans une famille allemande très francophile, je porte un vif intérêt à l’histoire française, surtout après avoir lu le roman Tignasse, un livre de littérature jeunesse de l’auteure Cili Wethekam sur la Révolution Française. Mais je n’aime pas rédiger des dissertations ou des comptes rendus. C’est plutôt la chimie qui me fascine : cette pure logique des formules
dans les livres et ces expériences en laboratoire. Cependant, comme souvent, ce sont les professeurs qui ont une influence déterminante sur le parcours et qui font évoluer les préférences personnelles : pour moi ce sont un professeur de chimie très autoritaire et un
professeur d’allemand et d’histoire très engagé qui me passionne pour la République de Weimar et la littérature aux XVIIIème et XIXème siècles. C’est lui qui me confronte au national-socialisme et m’incite à trouver une réponse aux questions centrales de l’histoire allemande contemporaine.
Après mon service civique comme conducteur ambulancier, j’étudie donc les littératures allemande et française ainsi que l’histoire franco-allemande aux universités de Wuppertal et de Münster. Quand je porte un regard sur ce passé, je pense que l’opportunité d’aller en
France en tant qu’assistant de langue étrangère a également joué un rôle essentiel. Ce programme offre une expérience très enrichissante, que je ne peux que conseiller. Ce n’est qu’avec cette expérience que le cinéma français, les bandes dessinées franco-belges et surtout
la chanson française me sont devenues familiers. J’ai encore des souvenirs vifs d’un concert de Léo Ferré, dont j’ai acheté après tous les disques.
Cependant, à mon retour de France, les choses deviennent sérieuses. Après mon master, un professeur d’histoire contemporaine me propose un poste de chercheur à l’Université de Münster et de m’inscrire au doctorat. En 1996, j’obtiens le doctorat (avec une thèse sur
l’histoire de la RDA) et en 2004, l’habilitation à diriger des recherches (avec un travail sur le Second Empire allemand). Ensuite, j’enseigne l’histoire contemporaine européenne à Münster, à l’Université de Californie à San Diego et à l’Université de Fribourg en Allemagne. Depuis 2013 enfin, j’enseigne à la Sorbonne Nouvelle. Qui suis-je?

Revue n°11

Passionné par les concepts de nation et de mémoire en Europe centrale et orientale, j’ai appris au travers de mes nombreux voyages et de ma carrière universitaire à déconstruire les stéréotypes et à comprendre la notion d’interculturalité. La chute du mur de Berlin en 1989 a été pour moi un événement marquant, qui m’a permis de découvrir cette « autre Europe », zone pleine de mystère. Je suis né en 1974 à Arras dans le Pas-de-Calais, dans une famille aussi peu germanophone que possible, et cela m’a semblé être une bonne raison pour faire de l’allemand. Dès le collège, j’ai participé à des échanges scolaires : la ville où j’habitais à l’époque, Vanves (dans les Hauts-de-Seine), était jumelée avec Lehrte près d’Hanovre. N’étant pas sûr de mon orientation professionnelle après le bac, je me suis tourné vers un Diplôme d’Études Universitaires Générales (DEUG) d’allemand. Durant mon passage à Asnières en 1992, j’ai obtenu une bourse me permettant d’aller étudier à Tübingen l’année suivante. Les cours passionnants proposés par l’université et l’expérience d’un séjour de 6 mois en Allemagne m’ont convaincu de prolonger mes études à l’étranger. J’ai alors obtenu une bourse Erasmus qui m’a permis de faire ma troisième année à Graz, choisissant cette ville pour découvrir l’Autriche et me rapprocher de l’ancien bloc de l’est. A côté de l’université, je profitais de cette localisation « stratégique » pour entreprendre de nombreux voyages – en stop, en bus, en train – vers l’Est : Hongrie, Slovénie, Croatie, Roumanie, Slovaquie, etc. Faire le lien entre la culture germanophone découverte en Allemagne et en Autriche et celle des pays d’Europe centrale et orientale m’intéressait beaucoup. J’ai fait à l’été 1994 mon premier grand voyage, de Prague à Damas. Je recevais un accueil très chaleureux dans chaque pays, où l’on me mettait pourtant en garde contre tous les brigands des pays voisins ! Ces idées reçues se sont toujours révélées fausses, et cela m’a donné une compréhension profonde, par l’expérience, de ce qu’est l’interculturalité, et de la nécessité de déconstruire les stéréotypes nationaux. Toutes ces notions acquises sur le terrain, je les ai ensuite consolidées par des connaissances universitaires, mais ces voyages furent pour moi très formateurs. J’ai donc prolongé mon séjour à Graz en quatrième année avec un poste d’assistant, et ne suis rentré en France qu’après toutes ces années en milieu germanophone, l’esprit rempli d’idées et de projets de recherche. Seulement, j’appris à mon retour qu’il était nécessaire que je passe l’agrégation pour faire de la recherche. Après deux ans de préparation, je l’obtint en 1998. J’ai ensuite enseigné pendant deux ans dans le secondaire, mais me suis rendu compte que je préférais reprendre la recherche et enseigner dans le supérieur. L’année suivante, j’obtins une bourse pour entamer une thèse. Je voulais allier réflexion sur les politiques mémorielles, avec lesquelles je m’étais déjà familiarisé durant mon mémoire de maîtrise, et mon intérêt pour l’Europe centrale et orientale. J’ai soutenu cette thèse en 2006, elle s’intitulait « Les frontières du dicible : les Saxons de Transylvanie et la Seconde Guerre Mondiale ». En parallèle de ma thèse, j’avais travaillé en tant qu’ATER à l’Institut d’études européennes de Paris 8, ce qui m’avait permis d’élargir mon domaine d’études aux thématiques de la 13 construction nationale en général. Juste après ma soutenance, j’ai été recruté comme maître de conférences à l’université de Reims, et après quelques années d’enseignement en ChampagneArdennes, j’ai été recruté à Paris 3, où j’enseigne depuis. A côté de cette carrière très académique, j’ai développé depuis mes années d’études en Allemagne et en Autriche une importante activité musicale en tant que chanteur. Ces deux parcours mobilisent des ressources très différentes mais elles se complètent et peuvent aussi se rencontrer – j’initie depuis deux ans les étudiants préparant les concours dans notre département aux techniques de respiration et de placement de voix pour les préparer à la fois aux oraux et à leur future activité d’enseignant. dad, canPassionné par les concepts de nation et de mémoire en Europe centrale et orientale, j’ai appris au travers de mes nombreux voyages et de ma carrière universitaire à déconstruire les stéréotypes et à comprendre la notion d’interculturalité. La chute du mur de Berlin en 1989 a été pour moi un événement marquant, qui m’a permis de découvrir cette « autre Europe », zone pleine de mystère. Je suis né en 1974 à Arras dans le Pas-de-Calais, dans une famille aussi peu germanophone que possible, et cela m’a semblé être une bonne raison pour faire de l’allemand. Dès le collège, j’ai participé à des échanges scolaires : la ville où j’habitais à l’époque, Vanves (dans les Hauts-de-Seine), était jumelée avec Lehrte près d’Hanovre. N’étant pas sûr de mon orientation professionnelle après le bac, je me suis tourné vers un Diplôme d’Études Universitaires Générales (DEUG) d’allemand. Durant mon passage à Asnières en 1992, j’ai obtenu une bourse me permettant d’aller étudier à Tübingen l’année suivante. Les cours passionnants proposés par l’université et l’expérience d’un séjour de 6 mois en Allemagne m’ont convaincu de prolonger mes études à l’étranger. J’ai alors obtenu une bourse Erasmus qui m’a permis de faire ma troisième année à Graz, choisissant cette ville pour découvrir l’Autriche et me rapprocher de l’ancien bloc de l’est. A côté de l’université, je profitais de cette localisation « stratégique » pour entreprendre de nombreux voyages – en stop, en bus, en train – vers l’Est : Hongrie, Slovénie, Croatie, Roumanie, Slovaquie, etc. Faire le lien entre la culture germanophone découverte en Allemagne et en Autriche et celle des pays d’Europe centrale et orientale m’intéressait beaucoup. J’ai fait à l’été 1994 mon premier grand voyage, de Prague à Damas. Je recevais un accueil très chaleureux dans chaque pays, où l’on me mettait pourtant en garde contre tous les brigands des pays voisins ! Ces idées reçues se sont toujours révélées fausses, et cela m’a donné une compréhension profonde, par l’expérience, de ce qu’est l’interculturalité, et de la nécessité de déconstruire les stéréotypes nationaux. Toutes ces notions acquises sur le terrain, je les ai ensuite consolidées par des connaissances universitaires, mais ces voyages furent pour moi très formateurs. J’ai donc prolongé mon séjour à Graz en quatrième année avec un poste d’assistant, et ne suis rentré en France qu’après toutes ces années en milieu germanophone, l’esprit rempli d’idées et de projets de recherche. Seulement, j’appris à mon retour qu’il était nécessaire que je passe l’agrégation pour faire de la recherche. Après deux ans de préparation, je l’obtint en 1998. J’ai ensuite enseigné pendant deux ans dans le secondaire, mais me suis rendu compte que je préférais reprendre la recherche et enseigner dans le supérieur. L’année suivante, j’obtins une bourse pour entamer une thèse. Je voulais allier réflexion sur les politiques mémorielles, avec lesquelles je m’étais déjà familiarisé durant mon mémoire de maîtrise, et mon intérêt pour l’Europe centrale et orientale. J’ai soutenu cette thèse en 2006, elle s’intitulait « Les frontières du dicible : les Saxons de Transylvanie et la Seconde Guerre Mondiale ». En parallèle de ma thèse, j’avais travaillé en tant qu’ATER à l’Institut d’études européennes de Paris 8, ce qui m’avait permis d’élargir mon domaine d’études aux thématiques de la 13 construction nationale en général. Juste après ma soutenance, j’ai été recruté comme maître de conférences à l’université de Reims, et après quelques années d’enseignement en ChampagneArdennes, j’ai été recruté à Paris 3, où j’enseigne depuis. A côté de cette carrière très académique, j’ai développé depuis mes années d’études en Allemagne et en Autriche une importante activité musicale en tant que chanteur. Ces deux parcours mobilisent des ressources très différentes mais elles se complètent et peuvent aussi se rencontrer – j’initie depuis deux ans les étudiants préparant les concours dans notre département aux techniques de respiration et de placement de voix pour les préparer à la fois aux oraux et à leur future activité d’enseignant. dad, can