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Ils/elles travaillent dans la culture

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Domaine de la culture

Veronica Savastano

actuellement dans le domaine de l’art (presse artistique)

Veronica a décidé de faire des études d’allemand car quand elle était plus jeune elle écoutait beaucoup de Rammstein (groupe de rock allemand, ndlr) et voulait comprendre ce qu’ils disaient. Mais c’est aussi son amour pour la littérature qui l’a poussée à faire de l’allemand pour lire les textes littéraires en langue originale. Avant d’arriver à l’Université Sorbonne-Nouvelle, Veronica a fait les deux premières années de licence en Italie, puis elle a fait sa troisième année de licence à Kiel. Elle a par la suite fait un double Master franco-allemand entre Paris et Cologne à Paris IV, puis enfin le Master Métiers de la Culture dans le Domaine franco-allemand au Département d’Études Germaniques de La Sorbonne Nouvelle

Comment êtes-vous arrivée au Département d’Études Germaniques de l’Université Sorbonne-Nouvelle ?

J’ai d’abord été en double Master franco-allemand à Paris IV, c’est un double Master avec l’Université de Cologne en philosophie allemande et c’était un master très axé sur la recherche. J’ai donc compris que ce n’était pas un Master fait pour moi et j’ai donc voulu faire quelque chose de plus professionnalisant pour entrer dans le monde du travail. En 2018, le Département d’Etudes Germaniques de l’USN proposait le Master Métiers de la culture dans le domaine franco-allemand, un programme qui m’a plu car c’était concentré sur le monde professionnel et l’insertion dans le secteur de la culture. J’ai postulé, j’ai été acceptée et j’ai donc fait mes deux ans de Master au Département d’Études Germaniques de l’USN.

Quels sont vos souvenirs durant vos études au sein du département ?

Je me suis sentie très à l’aise parce que je savais que tout ce que je disais avait une valeur. On a toujours écouté mes idées et on m’a toujours aidée à développer les projets que j’avais en tête. Ce que j’aime beaucoup dans cette université c’est que nous ne sommes pas juste un chiffre ou un étudiant invisible mais tu es bien au centre de tes études : on te considère. Dans cette université, on sent que les professeurs ont envie de te transmettre leurs connaissances, il y a beaucoup plus d’échanges entre les étudiant.e.s et les professeur.e.s et c’est ce qui m’a beaucoup plu.

Quel(le)s apports/conséquences pour votre vie professionnelle ?

Quand je fais des entretiens ici en France, on est toujours étonné de savoir que je parle couramment allemand, mais après, au quotidien, ce n’est pas une langue que j’utilise souvent. Bien sûr si vous partez vivre en Allemagne cela va vraiment vous aider, surtout que les salaires y sont plus intéressants.

Si je prends mon cas, moi qui travaille dans la presse artistique l’allemand va me servir, par exemple quand on doit contacter des musées, notamment des musées en Allemagne. C’est donc à moi de les contacter, car le fait de les contacter en allemand plutôt qu’en anglais permet d’avoir une réponse plus rapidement.. 

SSX & MAR (nov. 2021)

Elisabeth Gorecki-Schöberl

Cheffe de la division « Education culturelle, intégration, culture dans les régions et les zones rurales » au BKM (Déléguée du gouvernement fédéral à la culture et aux médias), à Berlin

« Le moteur, c’est l’envie, et c’est la passion qui mène à l’excellence ! »

« Après avoir reçu votre mail, j’ai tout de suite pensé à Hansgerd Schulte ! »

Ma sollicitation pour la revue des germanistes de la Sorbonne Nouvelle a donc réveillé chez Elisabeth Gorecki-Schöberl beaucoup de souvenirs. Et merveilleux réflexe qu’elle a eu : les noter. J’ai donc plusieurs anecdotes à vous faire découvrir…

A l’époque, le campus des germanistes se situait encore à Asnières mais elle connaît bien le site de Censier et son quartier car l’administration s’y trouvait déjà et elle faisait partie d’une chorale à Jussieu. Elle était inscrite en licence d’études franco-allemandes à la Sorbonne Nouvelle en 1991-1992.

Souvenir, souvenir ! Le premier qui lui est venu en tête à la suite à l’évocation de la Sorbonne Nouvelle était la personne de Hansgerd Schulte. Il l’a beaucoup marquée (ainsi que la communauté franco-allemande) et était assez impressionnant à ses yeux. En effet il était de 1972 à 1987 le président du DAAD et était une grande figure du monde universitaire, en tant que médiateur franco-allemand. Ainsi il fut à l’origine de la création de cette filière franco-allemande à la Sorbonne Nouvelle dans le cadre duquel Elisabeth Gorecki-Schöberl l’a eu comme professeur à Asnières. Il avait notamment organisé une soirée avec tou·tes ses étudiant·es au Théâtre du Soleil et c’est un souvenir inoubliable pour Mme Gorecki-Schöberl. Quel choc esthétique que la découverte de cet univers coloré et chorégraphique des Atrides d’Ariane Mnouchkine ! Les étudiant·es en sont ressortis très touché·es. Un autre souvenir par rapport à ce professeur est lors d’un cours « mixte », c’est-à-dire avec des étudiant·e·s français·es et allemand·es. Mr Schulte avait alors demandé à celles et ceux qui connaissaient le poème Le Roi des Aulnes par cœur de lever la main… Surprise ! Il n’y avait que des Français·es. Toutes et tous ont alors pris conscience de la différence culturelle et pédagogique entre l’Allemagne et la France. En effet le par cœur est une méthodologie bien française.

Après ses études, Elisabeth Gorecki-Schöberl entame une carrière impressionnante auprès des responsables politiques les plus haut·es placé·es. Elle a ainsi, à sa manière, suivi l’exemple de Hansgerd Schulte en s’engageant pour le franco-allemand à un niveau institutionnel. Elle était chargée de mission responsable des relations franco-allemandes à la chancellerie fédérale, sous le chancelier Gerhard Schröder. Elle a ainsi travaillé avec la conseillère française du chancelier, Brigitte Sauzay, médiatrice de l’interculturalité et, entre autres, initiatrice du programme qui porte aujourd’hui son nom, en partenariat avec l’OFAJ. Elle a été impliquée dans la Stiftung (Fondation) Genshagen, après sa création en 1993 et cofondée par Brigitte Sauzay. Elle a aussi travaillé auprès du ministre d‘Etat de la culture et ceci dans les relations internationales et notamment franco-allemandes pendant 14 ans, où elle a par exemple accompagné plusieurs conseils de ministres franco-allemands. En 2017, elle a changé de division, son sujet est désormais plutôt orienté sur la démocratie culturelle et l’accès à la culture, qui rejoint d’ailleurs en partie son sujet de mémoire de maîtrise, sur le modèle d’intégration des étranger·ères en France et en Allemagne. Elle a surtout travaillé dans ce cadre franco-allemand, qui constitue pour elle, le noyau essentiel et irremplaçable de la construction européenne. Son goût pour l’interculturalité, elle a réussi à le transmettre à sa fille, qui passe cette année l’Abibac.

En regardant en arrière, Elisabeth Gorecki-Schöberl estime que tout ce qu’elle a appris lui a toujours servi, même son cours sur le surréalisme ! D’où son conseil de nous détacher de l’orientation utilitariste au profit de ce que nous avons vraiment envie de faire. Et l’étudiante d’hier nous transmet à nous, étudiant·es d’aujourd’hui, ses encouragements : elle voit déjà en nous une continuité générationnelle du franco-allemand !

JG (décembre 2020)

Hannah Vogt

Chargée de projet à ARTE

« Je garde encore le contact avec certain.e.s de mes ancien.ne.s condisciples de la Sorbonne Nouvelle qui travaillent aujourd’hui dans le journalisme et la traduction. »

Je viens d’être recrutée comme chargée de projet au siège de la chaîne ARTE à Strasbourg. Auparavant, j’ai étudié la littérature comparée et le journalisme à Berlin, avant de venir en troisième année à la Sorbonne Nouvelle – Paris 3 grâce à une bourse du DAAD, ce que j’attendais depuis longtemps. Après une année d’études franco-allemandes à Paris 3, j’ai réussi à progresser en français et même à décrocher mon diplôme de licence, ce qui n’était pas gagné d’avance puisque les autres étudiants allemands du cursus étaient tous des romanistes et avaient un bien meilleur niveau de français que moi. Je trouvais l’ensemble des cours extrêmement intéressant, notamment la traduction et la littérature, les sciences politiques européennes et les relations culturelles. En outre, on n’était pas nombreux/-ses dans les groupes de TD. On posait des questions aux enseignant.e.s, et puis on avait des contacts avec les autres étudiant.e.s, ce qui m’a beaucoup plu. A la fin, après avoir appris durant les séminaires à distinguer les divergences linguistiques entre l’allemand et le français et à bien traduire entre ces deux langues, j’ai pu constater l’importance capitale de la langue pour notre pensée. A l’époque, les enseignements d’études germaniques et de littérature se déroulaient au centre d’Asnières et on venait à Censier pour les cours de politique et d’histoire de l’Europe. J’ai vraiment de beaux souvenirs de Paris 3, je me rappelle d’ailleurs toujours mes enseignant.e.s, comme Mme  Lauterwein qui nous a transmis des connaissances intéressantes sur l’art d’Anselm Kiefer et son lien avec la poésie de Paul Celan qui m’ont été très utiles durant ma formation de Master en Angleterre. 

Et puis j’ai fait des stages dans le domaine culturel et politique, entre autres à l’UNESCO à Paris. J’étais dans le département d’information et de communication, et j’ai fait aussi de la traduction pour d’autres départements culturels. Je m’occupais du domaine de « la liberté d’expression ». C’était une problématique intéressante et très actuelle. J’ai réfléchi à la liberté d’expression en ligne, c’est-à-dire, la façon dont on publie les contenus sur une plateforme, mais aussi la façon de protéger les journalistes et les artistes dans les pays où il n’y a pas de liberté d’expression. Nous avons mis ce travail en forme sur des blogs et nous avons organisé des conférences pour expliquer comment ils fonctionnaient techniquement.

Ensuite, je suis partie en Angleterre, où j’ai fait mes deux ans de Master en littérature à l’université d’Oxford, joué de la musique dans un groupe et enregistré dans un studio. Après la fin de mon parcours en Lettres, j’ai décidé de faire quelque chose de totalement différent, en l’occurrence, j’ai candidaté pour un travail dans le domaine de la numérisation dans une start-up à Berlin, et j’ai été acceptée grâce a mon profil littéraire et international. Dans cette société ne travaillent que des informaticiens. Or, ils cherchaient quelqu’un avec de bonnes compétences rédactionnelles. J’y suis restée trois ans. C’était ma seule expérience dans le domaine de l’informatique, mais elle avait toujours un rapport avec mes études à travers la rédaction sur les sujets d’actualité comme le tournant numérique et ses conséquences sur la société. C’est finalement grâce à cette expérience qu’on est venu me chercher pour occuper la charge de projet à ARTE. J’avais déjà fait un stage à ARTE auparavant et j’avais gardé des contacts. C’est ainsi qu’ils ont pensé à moi lorsqu’ils cherchaient quelqu’un pour développer des contenus rédactionnels dans des formats numériques, un domaine encore peu développé à ARTE et pour lequel il faut avoir des compétences dans les deux domaines. C’est un profil rare. Même si ce n’est bien sûr pas moi qui suis en charge du côté technique, je dois tout de même comprendre ce que me disent les informaticiens et pouvoir dialoguer avec eux pour leur proposer des formats nouveaux.

Et Paris 3 dans tout ça ? Depuis mon départ de Paris, je me suis continuellement éloignée du champ des études franco-allemandes. Mais aujourd’hui, à ARTE à Strasbourg, la maîtrise de l’allemand et du français et mes compétences interculturelles me sont indispensables pour communiquer avec les équipes au quotidien. Ainsi, mon nouveau travail n’est pas seulement une occasion de pratiquer mon français, mais aussi de continuer à réfléchir à ces deux langues et de renouer ainsi avec ce que j’ai appris à Paris 3. Du reste, je garde encore le contact avec certain.e.s de mes ancien.ne.s condisciples de la Sorbonne Nouvelle qui travaillent aujourd’hui dans le journalisme et la traduction, et c’est justement l’échange avec eux qui fait que Paris 3 est toujours ancré dans mon esprit.

 Propos recueillis et traduits par MEZ (21 ‎février ‎20

Marjolaine Portier-Kaltenbach

attachée de production à France Musique

« La scène musicale allemande foisonne de grands artistes et il n’est pas rare que l’on soit amenée à les interviewer en allemand! »

« Pour être franche, j’ai atterri à la Sorbonne Nouvelle de manière un peu fortuite. L’année précédent mon Master Recherche en Etudes germaniques, j’ai passé 6 mois en Erasmus à Berlin. Or, comme la Freie Universität avait mis une éternité à m’envoyer mes résultats, et que j’ai mis quant à moi un certain temps à les faire traduire par un traducteur agréé, je n’ai eu mon attestation de licence que très tardivement, et il n’y a que Paris 3 qui acceptait encore que l’on s’inscrive en septembre. Il se trouve que la fac était tout près de chez moi et qu’une bonne amie avec laquelle j’étais en licence à l’Université catholique s’y était aussi inscrite, tout cela se goupillait donc parfaitement bien! »

« J’ai pris conscience au tout début de mon Master d’Etudes germaniques que je ne souhaitais pas devenir traductrice ou interprète, que l’allemand n’était pour moi pas une fin en soi, et que je souhaitais donc élargir mon champs de compétences. C’est la raison pour laquelle je me suis inscrite à Paris 2 dans un nouveau master, dédié aux médias. En parallèle de ce master que j’ai suivi à Paris 2, j’ai effectué un an d’alternance chez France Musique (chaîne du groupe Radio France), puis mon contrat d’alternance a été prolongé d’un an avant de se transformer en CDD. C’est là que je travaille encore actuellement. »

« Lors de mon entretien d’embauche à France Musique, je me rappelle d’avoir dit à mon actuel patron: j’ai bien conscience que je n’ai pas le parcours exemplaire pour postuler à France Musique : je n’ai pas fait de musicologie mais seulement de l’anglais et de l’allemand… et il m’a immédiatement coupée pour me dire : SEULEMENT de l’allemand ? Vous ne vous rendez pas compte à quel point c’est précieux d’avoir des germanistes ici ! Et effectivement, dès qu’il s’agit de traduire des paroles de Lieder, ou qu’il y a des interviews en allemand, c’est à moi d’agir ! La scène musicale allemande foisonne de grands artistes et il n’est pas rare que l’on doive les interviewer en allemand, dans la mesure où leurs propos perdent bien évidemment toujours un peu de leur sel lorsqu’ils s’expriment en anglais. »

« Mon projet pour l’avenir est de passer d’attachée de production (mon poste actuel, qui consiste à aider les producteurs à préparer leur émission) à productrice moi-même (c’est à dire passer derrière le micro). J’ai présenté mes premiers concerts de jazz à l’antenne l’été dernier et c’était une expérience fantastique! Les chaînes de radio envoient des petits jeunes faire leurs armes derrière un micro chaque été, autrement dit à la période de l’année où les titulaires sont en vacances, c’est une chance inouïe. » 

 otb (en janvier 2019)

Laure Fougère

travaille au support fonctionnel pour AccorHotels

« J’ai été rédactrice en chef du septième numéro d’asnières-a-censier.fr! » 

Laure Fougère Ayant déjà terminé une prépa littéraire, Laure voulait améliorer ses compétences en langues étrangères et commence d’abord une licence d’anglais à Paris 7, puis y fait un Master 1 en traduction littéraire. Avant de terminer son Master en traduction spécialisée, Laure décide de faire une licence d’allemand et, en 2012, trouve le cursus d’Etudes Franco-Allemandes avec la mineure interculturelle à la Sorbonne Nouvelle-Paris 3. Elle a apprécié cette offre très pluridisciplinaire, combinant les enseignements d’allemand, de culture et de linguistique. Elle se souvient toujours avec plaisir des enseignants. 

Laure travaille aujourd’hui au support fonctionnel pour AccorHotels. Bien que son poste ne soit pas spécifiquement dans le franco-allemand, le lien n’est pas totalement rompu avec ses études à Paris 3 : l’allemand reste présent au travers de mails à destination d’hôtels allemands, autrichiens et suisses. 

Apprenant le thème de notre dossier, elle se souvient du bâtiment du campus Censier, qu’elle n’a pas beaucoup apprécié, car elle ne le trouvait ni logique, ni fonctionnel, ni confortable. Quelque chose qu’elle a aimé était le Stammtisch, auquel elle voudrait bien retourner, mais ce n’est malheureusement pas compatible avec ses horaires de travail. 

mkk 

Anne-Sophie Nicolas

travaille au service culturel d’une médiathèque du Val d’Oise

« Mon Master m’a beaucoup apporté sur un plan personnel » 

Pourquoi avez-vous étudié à Paris 3 ? 

Avant de m’inscrire en M1 Recherche d’Etudes germaniques à la Sorbonne Nouvelle en 2010, j’ai fait une licence LEA d’anglais et d’allemand à l’Université Paris VII. Comme j’ai fait ma troisième année en Erasmus près d’Hanovre, j’ai presque naturellement choisi l’allemand comme langue de spécialisation en master. L’année à l’étranger m’a beaucoup apporté, tant pour l’amélioration de la langue allemande que sur un plan plus personnel. J’en ai profité pour faire de nombreuses excursions, j’ai apprécié ce mode de vie et j’ai trouvé les Allemands très ouverts d’esprit, toujours accueillants. Les modalités de contrôle sont faciles pour les étudiants étrangers, avec moins d’heures de cours et davantage de devoirs à la maison que de partiels écrits. Compte-tenu du décalage des calendriers universitaires allemand et français, j’ai eu du mal à m’organiser, notamment en raison des échéances et des démarches à réaliser à distance. J’ai néanmoins validé le master à Paris 3, mais je n’ai pas souhaité poursuivre mes études ensuite, et me suis donc tournée vers la recherche d’emploi.

Comment s’est passée votre recherche d’emploi ? 

Avant de partir en Erasmus en Allemagne, j’avais déjà fait un stage au Ministère des affaires étrangères, essentiellement en français.  Du fait de mes études et de mon expérience internationale, j’ai ensuite cherché du travail dans le secteur culturel franco-allemand. Malheureusement, je me suis vite rendue à l’évidence : c’est un milieu très fermé, voire verrouillé, et les offres d’emplois dans cette branche sont assez peu nombreuses. Je me suis donc réorientée dans la recherche d’emploi seulement dans le domaine culturel français. J’ai travaillé dans des librairies, je suis passée par plusieurs services de la mairie, notamment au service culturel et dans la communication, puis j’ai participé à l’organisation d’un salon du livre dans une mairie, ce qui m’a beaucoup plu. Et voilà comment j’ai postulé dans la médiathèque du Val d’Oise où je travaille actuellement.

Utilisez-vous l’allemand dans votre travail ? 

A la médiathèque, j’utilise parfois l’anglais, notamment lorsque je dois interagir avec des personnes de toutes origines dans des ateliers de FLE ou d’intégration de publics étrangers. J’ai donc été amenée à développer des qualités pédagogiques, que ce soit vers un public d’adultes ou d’enfants, puisque j’accueille des classes et réalise des animations comme la narration de contes, la projection de films ou d’ateliers de jeux sur tablettes. Je constate un réel développement de la politique numérique pour rendre internet accessible à tous et pour adapter des supports papiers aux supports informatiques.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

Mes études d’allemand ne me servent pas actuellement, pas plus d’ailleurs que ma poursuite d’études en master puisque je suis positionnée sur un emploi qui ne requiert qu’un Bac+2. Toutefois, je ne regrette pas d’avoir fait ces études qui, sur un plan personnel, furent intéressantes. Je songe à passer les concours de la fonction publique pour évoluer dans une branche plus ou moins similaire, et obtenir le statut de fonctionnaire.

eml (déc. 2017)

Lisa Thierry

volontaire européenne dans l’ONG ELIX à Athènes

« Je ne regrette en aucun cas de ne pas avoir enchaîné un master à la fin de ma licence, au contraire. »

« Après avoir obtenu mon bac ES mention européenne en juillet 2012 en région parisienne, j’ai postulé pour une licence d’allemand à Paris 3. Ce choix me paraissait tout à fait normal : ayant un père français et une mère allemande, je baigne depuis toute petite dans le milieu franco-allemand. J’ai toujours aimé parler la langue allemande, me rendre en Allemagne afin d’y passer des vacances en famille ainsi que comparer ces deux cultures qui m’intéressent tant. J’ai donc décidé de les étudier.

Outre le fait de partir un semestre à Göttingen en L2, ce que j’ai apprécié avec cette licence, c’est qu’elle m’a permis d’effectuer plusieurs stages : un à l’office national allemand du tourisme et un au DAAD, tous les deux situés à Paris. Je savais que je voulais travailler dans le milieu du franco-allemand mais dans quel domaine exactement, je ne le savais pas encore. Ces deux stages m’ont appris beaucoup de choses sur ce qui me plaisait, et sur ce qui ne me plaisait pas.

Une fois ma licence terminée, j’ai décidé, contrairement à plusieurs de mes camarades, d’effectuer une année sabbatique. Les six premiers mois étaient planifiés : un stage au Centre Français de Berlin, grâce auquel j’ai découvert un nouvel univers : celui des échanges interculturels de jeunes. Après mon stage, le Centre Français m’a proposé un poste de « Travail chez le partenaire » financé par l’OFAJ.

Cette année fut très enrichissante pour moi, j’ai enfin su vers quel domaine je voulais me diriger et travailler plus tard. Suite à ce poste, je me suis mise à mon compte pour travailler en tant qu’animatrice interculturelle-traductrice lors de rencontres interculturelles de jeunes.

Depuis septembre 2017, je suis à Athènes où j’effectue un Service volontaire européen. Suite à mes deux ans à Berlin, je souhaitais m’ouvrir à l’international afin de découvrir de nouveaux projets et de nouvelles initiatives. Je suis actuellement dans l’ONG ELIX, qui travaille principalement avec les réfugiés mais qui se concentre aussi sur la mobilité européenne.

Je ne regrette en aucun cas de ne pas avoir enchaîné un master à la fin de ma licence, au contraire. En empruntant cette route, j’ai pu faire mes propres expériences et découvrir ce qui me plaisait réellement. »

cle (nov. 2017)

Gabrielle Perrouas

co-organisatrice du festival de cinéma jeunesse : le Carrousel international du film de Rimouski, au Canada

 « Mon année au département d’allemand m’a permis d’élargir mes réseaux et horizons en participant à différents événements culturels, échanges, tandems, voyages… »

Après deux ans de classe préparatoire littéraire option cinéma, je suis entrée directement en 3e année de cinéma et audiovisuel à la Sorbonne Nouvelle. Puis, ayant voulu effectuer une année Erasmus en Allemagne et poussée par Matthias Steinle (un professeur de cinéma allemand et le coordinateur des Erasmus en cinéma), je suis la première à être partie à la HFF (Hochschule für Film und Fernsehen) à Potsdam pour effectuer ma première année de Master (en recherche cinématographique et audiovisuel, spécialité esthétique et Histoire de l’Art). C’est en revenant de cette année fort enrichissante que j’ai décidé de poursuivre mes études au département d’allemand à la Sorbonne Nouvelle. Cela n’a pas été une mince affaire d’adapter mon emploi du temps, malgré le programme plus « léger » des Master 2 en cinéma. Mes cours se chevauchant parfois, je me sentais comme Hermione Granger et aurais bien aimé posséder son fameux sablier « retourneur de temps ».

J’ai choisi la licence franco-allemande car le programme bilingue proposé dans différentes spécialités (Histoire, Lettres, Culture, Politique, Relations internationales etc) ainsi que l’étude de la langue me semblait le plus complet pour parfaire mes connaissances sur nos deux pays. J’ai obtenu ma licence en fin d’année, en 2014, et j’ai hésité à continuer en Master mais il me fallait vraiment clore mon premier Master de cinéma (je n’avais pas réussi à suivre tous les cours à cause des chevauchements et à rédiger complètement mon mémoire).

Quels ont été les apports de ce cursus en termes de connaissances et de construction personnelle ?

Le cursus a été complémentaire avec ma formation cinématographique, notamment pour mon mémoire dont le sujet questionnait la réécriture de l’histoire allemande dans les films allemands contemporains. J’ai pu élargir à la fois mes réseaux et mes horizons en participant à différents événements culturels, échanges, tandems, voyages… et même l’année qui a suivi, où je suis retournée achever mon M2 en cinéma.

Ton meilleur et ton pire souvenir dans ce cursus. Mon pire souvenir est de ne pas avoir totalement préparé mon exercice de thème et d’avoir dû improviser sur place… Le thème restera un exercice de rigueur douloureux…Sinon, des exposés parfois rébarbatifs, scolaires et donc inintéressants de la part de camarades de deux à trois ans plus jeunes. Avoir l’impression d’un retour en « arrière » et d’une perte de temps (dû au fait que je savais que je pouvais avoir des cours de cinéma en même temps). Mon meilleur souvenir est ma rencontre avec Julien Corbel et nos différents travaux en commun (nos exposés  sur Berlin Alexanderplatz, sur la cohabitation en France etc.), nos entrevues pour le journal « Asnières à Censier » (notamment avec Hansgerd Schulte).

Que fais-tu cette année et quel(s) est/ sont tes objectifs professionnels à présent ? Je suis maintenant au Québec depuis plus d’un an (stage d’août à décembre 2015 puis retour de janvier à mars 2016 puis retour en avril 2016 jusqu’en avril 2018 voire au-delà…). Maintenant j’ai un visa de travail dans un festival de cinéma jeunesse (le Carrousel international du film de Rimouski). Actuellement, je suis en période « d’hibernation » car pendant l’hiver pas de subvention possible pour le festival. Cela prouve que l’allemand peut aussi bien mener de l’autre côté de l’Atlantique… Je regrette de ne pas m’en servir souvent mais si l’occasion se présente (invité allemand ou autrichien à Montréal dans des festivals de cinéma), je sauterai dessus !

clr (déc. 2016)

Joyce Weil

chargée de recherche et de médiation à l’association SynLab

 « Asnières, ça faisait un peu village d’Astérix »

J’ai passé un bac L en 2008 dans une boîte à bac, un lycée assez prestigieux après lequel tout le monde partait en prépa, ce que je ne voulais surtout pas faire. J’ai donc délibérément choisi de venir à la fac. Je m’intéressais beaucoup à l’histoire, mais c’était important pour moi de pouvoir étudier deux matières et comme j’avais fait un programme Voltaire, je me suis tournée assez naturellement vers le parcours histoire-allemand, pas seulement pour continuer à parler allemand, mais aussi pour découvrir tout ce qu’il y a autour de la langue. Je suis partie en Erasmus à Berlin au deuxième semestre de L2 (ce qui n’était possible qu’à Paris 7 et à condition d’insister un peu), parce que les sujets des cours de L3 à Paris m’intéressaient plus que ceux de l’année précédente. A la Humboldt Universität, j’ai eu des cours d’histoire passionnants : on dit souvent qu’Erasmus c’est pour faire la fête, mais ça vaut aussi vraiment le coup parce qu’on a accès à une large offre de cours.

Après avoir fini ma licence à Paris, je suis partie un an à Cardiff en tant qu’assistante de langue pour améliorer mon anglais et me laisser le temps de réfléchir à la suite. Jusque-là, j’envisageais de travailler dans l’édition, secteur dans lequel j’ai fait beaucoup de stage au fil de ma licence, et mon fil rouge c’était surtout : ne pas être prof. Mais finalement, je trouvais que le plus intéressant comme job dans une maison d’édition, c’était de lancer la sienne, projet que j’ai toujours, pour plus tard, et j’ai décidé de faire un master plus axé vers le numérique. Je suis entrée à l’école des Chartes dans le master « Nouvelles technologies appliquées à l’histoire », mais j’en suis partie au bout d’un an parce que l’enseignement là-bas portait surtout sur l’histoire du livre, ce qui était intéressant en soi mais avait peu à voir avec le numérique. Or le numérique est devenu incontournable et je pense qu’il est important d’en connaître les codes et de savoir comment ça fonctionne pour être lucide sur ce qu’on peut faire ou pas avec le numérique dans la culture. J’ai donc fait le M2 Pro « Médiation culturelle – Patrimoine et numérique » qui est un partenariat entre Paris 8 et Paris 10, avec un mémoire sur les interfaces haptiques. En parallèle, j’étais en service civique dans une association de médiation scientifique qui s’appelle « Les atomes crochus ». Ce qui était bien dans cette expérience, c’est que j’étais chargée d’un projet au sein de l’association, que j’ai pu mener du début à la fin.

Après mon master, j’ai commencé à chercher du travail et au bout d’un mois je me suis retrouvée par hasard prof d’allemand en tant que contractuelle. Je le suis restée jusqu’à la fin de l’année scolaire, et ensuite j’ai trouvé le poste où je suis maintenant à SynLab, une association qui a pour but d’aider les enseignants à se former, de changer un peu la façon de voir cette formation. Au départ, j’ai été embauchée pour rédiger leurs outils de formation en ligne. Maintenant je travaille sur un projet plus vaste d’expérimentation sur la formation des enseignants en partenariat avec l’ESPE et le rectorat de Créteil. En gros, on teste le principe d’une formation sur trois ans (le M2 et les deux premières années de titularisation) pour éviter que les néo-titulaires se retrouvent lâchés dans l’arène à la fin de leur seule (et brève) formation initiale. Ça fait maintenant deux ans que je suis dans cette association, et j’ai maintenant envie de monter mon propre truc sous forme d’un site nommé « Les écriveuses », qui est (/sera bientôt) un service d’aide à la rédaction et d’accompagnement à l’utilisation des outils numériques.

De ma licence, je me rappelle surtout des cours de grammaire de L1, et que « la grammaire, c’est la colonne vertébrale de la langue », et beaucoup des cours alternatifs proposés par des profs de Paris 3 et d’autres facs pendant le blocus contre la LRU en 2009. Il y avait aussi « l’université Paris 14 », des cours mobiles dans la ligne 14 du métro, et on avait monté un cinéclub militant à Paris 7. D’Asnières, j’ai surtout le souvenir que c’était un environnement assez spécial : comme si on avait mis toutes les langues qui n’intéressent personne dans un endroit perdu au milieu de nulle part. C’était chouette, ça faisait un peu village d’Astérix.

mgb (avril 2017)

Pia Meierkord

assistante dans un cabinet d’expertise de tableaux anciens à Paris, Saint Honoré Art Consulting

« J’ai également participé à la rédaction de la revue en ligne « Asnières à Censier » ! »

Pouvez-vous nous présenter votre parcours avant d’étudier à la Sorbonne Nouvelle?

Après le bac, j’ai décidé de travailler en tant que jeune fille au pair à Paris pendant un an et demi. J’avais fait du français au lycée et j’ai toujours aimé la langue et la culture française. Puis j’ai déménagé à Berlin – je viens de Bielefeld – afin de commencer mes études à la Freie Universität de Berlin. J’ai choisi le double diplôme en « Frankreichstudien ». Mes matières étaient le droit, l’histoire de l’art, la littérature française et des cours de langue française. A côté de mes études, j’ai travaillé en tant qu’assistante à la rédaction pour le site NRW.de. J’ai passé la troisième année d’études à Paris 3, comme prévu dans le cadre du double diplôme.

Avez-vous des souvenirs de Paris 3 à partager?

C’était une année intéressante! J’ai participé, comme vous, à la rédaction de la revue en ligne « Asnières à Censier » ! Je me souviens encore que nous avons participé à un évènement à l’institut Goethe à l’occasion de la journée des professeurs allemands. Mon année à Paris 3 était une bonne décision, je suis toujours en contact avec des personnes de mon cursus et chacun fait quelque chose de différent et avec succès !

Puis-je vous demander quel était le thème de votre mémoire de licence ?

Oui, c’était un travail très intéressant ! J’ai comparé deux romans français de Zola et Balzac d’un point de vue artistique.   Dans quelle mesure votre année d’échange à Paris 3 était-elle utile pour vous ? Après mon année à Paris 3, j’ai dû effectuer un stage. Je l’ai fait dans un cabinet d’expertise de tableaux anciens… où j’ai en suite obtenu un travail à temps plein ! J’y travaille actuellement en tant qu’assistante et ai diverses responsabilités. Les cours d’histoire de l’art que j’avais à la FU Berlin et les cours de langue à Paris m’ont été très utiles pour mon stage ainsi que pour mon travail actuel. Je fais des travaux de recherche, puisque j’explore les archives des musées du Louvre et d’Orsay. Le séjour à Paris m’a permis de travailler dans la capitale française.

mef (janvier 2017)

Solene Moy

guide touristique de langue allemande à Paris

 « Je me souviens d’une anecdote vraiment drôle dans un cours de grammaire avec Valérie Robert qui a réussi à rendre la grammaire allemande intéressante. »

Qu’est-ce qui vous as amené à faire des études d’allemand? Mon parcours est un peu particulier. J’avais l’allemand comme deuxième langue étrangère et après le bac, je ne savais pas ce que je voulais faire, mais je savais que j’aimais l’allemand, bien que je n’aie jamais été en Allemagne avant. Contrairement à ce qui se passe en Allemagne, en France, on finit le bac à 18 ans et souvent on est trop jeune pour savoir ce qu’on veut faire concrètement. On se retrouve devant des fiches post-bac et on est perdu. Alors moi, j’ai choisi l’allemand au pif est je suis arrivée à Asnières en Licence Franco-Allemande. Quand je suis arrivée, j’avais un niveau assez nul, assez pitoyable, vraiment terrible. Et j’ai, pour la première fois, entendu des mots comme « Abibac », etc. et là, je me suis rendue compte de la différence de niveau entre moi et les autres et cela se ressentait aussi au niveau des notes!

J’ai même hésité à arrêter, mais avec un peu de recul, je suis très contente d’avoir choisi ce cursus-là. Car, malgré un début très difficile, j’ai eu la chance d’avoir un corps professoral excellent, de très bons profs, qui ont bien remarqué les différences et qui ont mis en place des groupes de niveau pour l’apprentissage des langues. Honnêtement, je trouve ces groupes très bien, cela nous permet d’évoluer autour des gens du même niveau. Le fait d’être un petit groupe, créait aussi des liens intenses entre les étudiants.

Quel souvenir j’ai d’Asnières? C’était il y a cinq ans, alors franchement cela fait loin… Mais je me souviens d’une anecdote dans un cours de grammaire avec Valérie Robert qui a quand même réussi à rendre la grammaire allemande intéressante, et c’est quelque-chose que je lui dois. Et là, on avait des grands amphis, mais on n’était que trente personnes. Et déjà cela donnait une certaine atmosphère, il y avait une odeur assez particulière, c’est un peu comme ma petite madeleine de Proust. Ceux qui ont connu Asnières s’en souviennent sûrement. On avait un cours de grammaire à 8 h du matin et c’était le weekend après Pâques, alors peu de monde était venu, et Mme Robert avait ramené des chocolats et elle a dit « c’est pour les courageux qui sont venus ». C’est un peu ça Asnières. Au département d’études germaniques, on la chance d’avoir des profs qui connaissaient votre nom, ce qui créait une force et un esprit particulier. 

Après la licence j’ai d’abord fait un an d’Erasmus à Berlin et après, j’ai bifurqué en Master Allemand / Histoire avec Paris 7 et c’était génial. J’ai fini ce Master et l’année dernière, quand j’étais à la cafétéria de Paris 3, j’ai trouvé une petite fiche où on proposait de faire des « Stadtführungen » à Paris. Du coup,

j’ai envoyé un message et cela fait maintenant presque deux ans que je fais des « Stadtführungen » en allemand à Paris. 

Ce job intègre vraiment parfaitement mes études, mais ce qui m’a vraiment aidé à entrer dans la vie professionnelle, c’était de parler l’allemand. J’ai reçu plein d’appels des recruteurs pour des jobs dans un peu tous les domaines, seulement, parce que je parlais l’allemand. C’est un vrai plus. Parce que l’anglais, tout le monde sait le parler. Parler l’allemand est vraiment une compétence particulière.

Si j’avais un tuyau à donner aux étudiants actuels: soyez patients avec l’administration et ne vous reposez pas sur vos acquis ! Et surtout : Participez aux événements que les profs organisent pour vous, car c’est une vraie chance de travailler sur des sujets aussi intéressants !

hvo (déc.2016)

Amandine Levasseur

Actuellement à son compte dans l’évènementiel et la communication

« l’allemand était un atout majeur, car en réalité peu de personne dans le monde […] parle allemand. Ainsi cela m’a ouvert beaucoup de portes »

Amandine visait les licences de médiation culturelle en ayant pour but de devenir attachée culturelle à l’étranger pour représenter la culture française à l’étranger. Les licences de médiation culturelle étant beaucoup trop demandées, le service orientation lui a conseillé de faire des études d’allemand. Elle s’est donc tournée vers la licence d’études franco-allemandes avec une mineure en études interculturelles de 2013 à 2017. Pendant l’entretien, elle admet que « la rigueur enseignée pour les recherches, les dossiers m’a vraiment aidée, et me suit au quotidien, je tiens également à la transmettre aux apprentis que je peux avoir. ».

En 2017, après sa dernière année de licence, elle cherchait un emploi pour la saison. C’est par hasard qu’elle fut contactée pour travailler au Mont Saint Michel. C’est à ce moment-là que sa vie professionnelle débuta.

Elle a eu quelques expériences dans le monde de l’hôtellerie où elle a admis que dans cette d’activité : « l’allemand était un atout majeur, car en réalité peu de personne dans le monde de l’hôtellerie parle allemand. Ainsi cela m’a ouvert beaucoup de portes ».

Cependant, après ces nombreuses expériences en hôtellerie, elle s’est rendue compte que ce n’était pas sa voie. Elle préférait aller dans l’évènementiel, domaine qui l’avait toujours attirée, elle a maintenant créé sa société d’évènementiel et de communication depuis 2019.

Cette année la grande nouveauté est qu’elle interviendra dans une université parisienne pour donner un cours sur la gestion de projet et la stratégie de communication.Quand j’évoque la question des souvenirs ou des anecdotes qu’elle a éventuellement eu à Paris 3, elle me raconte que c’est à Paris 3 qu’elle a rencontré son meilleur ami, qui, lui, est devenu professeur d’allemand au collège.

Puis elle me raconte qu’elle a eu l’opportunité de travailler avec le Mémorial de la Shoah à Paris dans le cadre de son mémoire de fin de licence, ce qui fut sa plus grande fierté de l’année, elle a beaucoup insisté sur le fait qu’il fallait travailler sur un sujet pour lequel on avait beaucoup d’intérêt pour que l’on ne se lasse pas.

Enfin, elle évoque un souvenir poignant, elle se souvient du lendemain des attentats de Charlie Hebdo, le 7 janvier 2015 : « Le gouvernement annonce une minute de silence nationale à 12h le 08.01. Nous nous sommes tous retrouvés sur le parvis de l’université (les enseignants, le personnel, les étudiants) avec un stylo dans notre main, levé vers le ciel […] c’était un moment très fort, car Paris 3 est une fac de lettres, de sciences humaines, mais aussi parce que nous étions désormais tous des citoyens français touchés par les évènements de la veille, en communion avec les familles des victimes. Pas un seul bruit sur ce parvis, un moment suspendu dans le temps, à jamais gravé dans nos mémoires. »

Le dernier souvenir qu’elle me livre est, pour elle, le moment où elle a osé communiquer en allemand : le voyage universitaire en lien avec la prépa à Weimar sur le thème des philosophes allemands des Lumières. Elle a vraiment apprécié ce voyage qui fut riche en émotions, en découvertes et en apprentissage.

ELC

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Compte rendu de la conférence sur l’écologie

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Nora Bouazzouni : « Quand vous êtes une petite fille, vous voyez très tôt que la grosseur est indésirable »

Journaliste, écrivaine, traductrice… À trente-sept ans, Nora Bouazzouni a déjà travaillé pour une vingtaine de médias de renom, publié trois livres, co-scénarisé et même joué dans deux webséries. Spécialiste des thématiques de genre et d’alimentation, qu’elle explore notamment à travers le cinéma et les séries télé, la jeune femme observe notre société au prisme multiple d’une identité franco-algérienne et queer – une voix intersectionnelle encore largement minorisée. Nous l’avons rencontrée autour de son premier ouvrage, intitulé Faiminisme, quand le sexisme passe à table, paru aux éditions Nouriturfu en 2017.

© Twitter de Nora Bouazzouni

Si elle devait essayer de cuisiner le patriarcat, Nora Bouazzouni l’assaisonnerait avec une sauce mayonnaise maison, « donc bien moutardée », ou bien une béarnaise, parce qu’elle « aime bien l’estragon ». S’il semble difficile de rendre une oppression appétissante, il y a néanmoins visiblement moyen de se saisir du sujet avec humour sans rien ôter à la justesse du propos. C’est en effet en quatre chapitres aux titres savoureusement sarcastiques (tels que « Madame est asservie ! », ou encore « Patriarchie Parmentier ») que son essai Faiminisme décrypte l’étroitesse des liens entre nourriture et misogynie. En s’attaquant à des questions plus épineuses les unes que les autres – de « Où se cachent les cheffes ? » à « Le féminisme est-il nécessairement végétarien ? », en passant par « À quoi ressemblerait une assiette masculine ? » – Nora Bouazzouni s’intéresse notamment aux injonctions liées à l’alimentation que subissent les femmes et personnes perçues comme telles, mais aussi à l’écoféminisme, à l’exploitation des femmes dans le système alimentaire mondial et à la grossophobie.

Alimentation et grossophobie : quand la société s’ingère dans l’assiette des femmes

C’est d’ailleurs l’expérience de cette discrimination qui lui a permis, très tôt, d’identifier le sexisme alimentaire. « Quand vous êtes une petite fille, vous voyez très tôt que la grosseur est indésirable. […] J’ai grandi dans une famille où il y avait des remarques grossophobes quotidiennes », confie la journaliste : à table, son père faisait régulièrement mention du poids de sa mère. « Ça vous force à y penser et ça vous met face à une violence, une violence qui est liée à l’alimentation puisque les remarques étaient liées à ce que ma mère mangeait. » Elle cite également les insinuations des collègues à la cantine, d’une boulangère qui l’a marquée quand elle était enfant, ou encore des serveurs dans les restaurants (« Plus souvent des serveurs que des serveuses », précise-t-elle). « C’est dingue, la sans-gênance des gens. Ce qui est le plus mesquin et le plus pernicieux, c’est les remarques qui ne parlent pas de votre corps… mais qui en parlent quand même ! À travers ce que vous allez mettre dedans. »

À l’école aussi, elle a été confrontée à la grossophobie, bien qu’elle n’en ait pas directement été la cible. Elle se souvient particulièrement des cours de sport en équipes, où les capitaines devaient choisir les élèves qui les rejoindraient. « Moi, j’étais choisie en avant-dernier, souvent. Parce que juste après moi, il y avait la fille grosse de la classe », raconte-t-elle avec une moue amère. Elle explique qu’il y a « une corrélation » entre le poids et « ce que vous valez au sens physique, que ce soit dans les yeux des garçons ou des filles, mais surtout des garçons » (et glisse par ailleurs qu’à l’époque, les enseignant•es d’EPS n’interrogeaient pas vraiment le « biais sexiste » qui se révélait dans le fait de désigner systématiquement des garçons pour diriger les équipes).

De Fantômette aux sitcoms américaines, le mépris des gros•ses dans la fiction

Dès le plus jeune âge, Nora Bouazzouni a aussi perçu l’omniprésence de cette discrimination que vivent les personnes grosses dans la littérature qu’elle consommait. Elle se rappelle notamment son malaise en lisant la célèbre série jeunesse Fantômette de Georges Chaulet (emblématique de la collection « Bibliothèque rose » chez Hachette), créée dans les années 1960 : « C’est hyper bien d’avoir une héroïne androgyne badass, mais le problème, c’est qu’on fait passer son physique souple, élancé, athlétique, comme une caractéristique, une vertu, morale. C’est pour ça qu’elle résout les enquêtes et qu’elle est plus intelligente que ses copines [dont l’une, Boulotte, est en surpoids, et l’autre, Ficelle, très mince, ndlr]… parce qu’en fait, c’est presque pas une fille ! », contrairement aux deux personnages secondaires qui incarnent les deux pôles opposés d’une féminité clichée et exacerbée. Finalement, à Fantômette, la journaliste préfère l’héroïne de la « Bibliothèque verte » Alice Roy (Nancy Drew en version originale), créée par le collectif d’auteur•ices Caroline Quine dans les années 1930. « On ne neutralise pas son genre pour dire que c’est pour ça qu’elle est maline. […] Donc pour moi, c’était moins problématique. »

Celle qui est entre-temps devenue spécialiste en séries télévisées souligne également la grossophobie plus ou moins latente dans cet autre champ de la culture mainstream. « Vous voyez bien de qui on se moque […], que dans les comédies américaines ou françaises, le personnage gros, c’est le personnage rigolo, maladroit… et qui ne fait que manger ! Et il est un peu sale […], donc c’est jamais quelqu’un qui est montré comme courageux, qui a de l’agentivité [terme popularisé par lae sociologue Judith Butler et qui désigne la puissance d’agir, ndlr], voire qui est désirable… Ou alors c’est le geek, donc qui est intelligent, mais pas sexy, un peu bébête, un adulescent alors qu’il a 45 ans… Donc ce sont toujours des gens qui sont moqués, ou bien qui sont des faire-valoir du héros ou de l’héroïne. »

Des modèles féminins encore largement imparfaits, notamment pour les enfants

Nora Bouazzouni soulève également de nombreux autres aspects questionnables des représentations féminines dans la fiction jeunesse, et notamment dans les dessins animés – dans lesquels elle baignait étant enfant, puisque sa mère est nourrice. Elle se souvient particulièrement du jour où elle a été frappée par le personnage de Lili dans Franklin : « C’était la énième fois qu’elle était insupportable, c’était le stéréotype de la mean girl » (du personnage féminin dont le seul rôle est de semer la discorde dans le groupe d’ami•es, ndlr). Dans d’autres séries, on remarque immédiatement le « syndrome de la Schtroumpfette » (la seule fille dans un groupe de garçons, qui incarne à elle seule la féminité de la bande alors que les personnages masculins ont, eux, une réelle individualité, ndlr). Même dans des séries comme La Pat’ Patrouille qui respectent une parité de genres dans les personnages, le héros est systématiquement un garçon. « De toute façon », précise-t-elle, « pour moi… c’est une série problématique de droite. Pro-flic, etc. J’espère qu’il y a des gens qui font des thèses là-dessus ! »

Elle met en lumière cette focalisation sur les protagonistes masculins grâce à la « théorie du sac à main » développée par l’Américain Paul Feig, réalisateur du film Mes meilleures amies (Bridesmaids en version originale) : si un couple hétérosexuel entre dans une boutique de prêt-à-porter, la femme ne verra aucun problème à porter le sac à dos de son compagnon sur son épaule le temps que celui-ci essaye un vêtement. Au contraire, si c’est elle qui doit confier son sac à main à son partenaire, il prendra bien soin de le poser à ses pieds afin que tout le monde puisse constater qu’il ne lui appartient pas. Pour Paul Feig, c’est un mécanisme identique qui conduit le cinéma à préférer produire des personnages principaux masculins : les femmes n’ont pas de souci à se déplacer pour voir un film sans héroïne, alors que les hommes ne s’intéressent qu’à ceux qui mettent en scène un héros. Pour Nora Bouazzouni, le genre féminin est par essence « excluant » pour les hommes, qui se perçoivent eux-mêmes comme le genre neutre. C’est pourquoi beaucoup se sentent mis de côté lorsqu’on utilise l’écriture inclusive, notamment face à des pratiques comme l’accord de proximité, ou même par les réunions en non-mixité… alors qu’ils ne comprennent pas forcément ce que les femmes peuvent reprocher à la composition du CAC40, ironise la journaliste.

Combler le manque d’appétence universitaire pour le genre comme angle d’étude

Lorsque la toute jeune maison d’édition Nouriturfu, qui n’avait alors publié qu’un seul ouvrage, l’a contactée pour lui proposer d’écrire un livre qui mêlerait les thématiques de genre et d’alimentation, Nora Bouazzouni avait donc déjà beaucoup de raisons de s’exprimer… mais elle avait aussi le « syndrome de l’impostrice ». Et puis, « j’ai ouvert un Word, j’ai gratté trois pages d’un coup et je me suis dit “Ouais, je crois que j’ai des trucs à dire là-dessus, en fait” », sourit-elle. Son deuxième livre, paru sous le titre de Steaksisme, en finir avec le mythe de la végé et du viandard (Nouriturfu, 2021), c’est elle qui en a eu l’idée, pour compléter le premier dans lequel elle n’avait pas eu suffisamment d’espace pour développer tous ses arguments.

Pour elle, l’engouement autour de son premier essai vient d’abord d’un étonnant et persistant manque d’exploitation du croisement entre genre et nourriture dans la littérature scientifique en France. En effet, les sources qu’elle a utilisées pour ses recherches sont majoritairement anglophones. « En France, il n’y a surtout pas beaucoup de sociologues de l’alimentation. Oh, il y en a qui sont très connus, et qui ont d’ailleurs tous des noms d’animaux », s’amuse-t-elle (mentionnant notamment Jean-Pierre Poulain), « mais dans leurs bouquins, le genre n’est pas hyper fouillé. » En s’entretenant avec des enseignant•es-chercheur•euses spécialistes de l’alimentation, elle a réalisé qu’ils et elles avaient en fait un certain désintérêt pour l’aspect genré de leur sujet de prédilection, alors même que celles et ceux qui travaillent par exemple sur les troubles du comportement alimentaire ne voient « presque que des patientes » (elle insiste sur le féminin).

De plus en plus de porosité entre les milieux universitaire et journalistique

Ces échanges pouvaient d’ailleurs mener à des situations presque absurdes, où la journaliste se voyait exposer des arguments qu’elle avait elle-même écrits des années auparavant, par des universitaires qui avaient le sentiment de les avoir découverts de leur propre chef à l’instant même. Elle parle même, en riant, d’une sorte d’« universitairesplaining » inconscient (néologisme formé sur le modèle du mansplaining développé par les mouvements féministes, qui désigne la façon que peuvent avoir les hommes d’expliquer aux femmes des sujets qu’elles maîtrisent très bien, ndlr). « J’étais assez vexée », admet-elle, « parce que j’ai découvert que le milieu universitaire qui s’intéresse au sujet de l’alimentation n’avait pas lu mes bouquins. […] En fait, ils ne vont pas chercher à lire d’autres gens qu’eux-mêmes. Ils ne s’intéressent pas à ce qui peut sortir qui n’est pas écrit par un de leurs pairs. Et j’ai trouvé ça terrible. »

Toutefois, Nora Bouazzouni se félicite que cette barrière hermétique entre travail de recherche et travail journalistique se voie être petit à petit déconstruite, notamment par la transformation du secteur de l’édition. Si elle regrette, bien sûr, que l’économie du livre demeure « une catastrophe », elle applaudit l’élargissement de maisons d’édition spécialisées dans la recherche à des journalistes et militant•es, de même que la croissante publication d’essais universitaires chez des éditeurs généralistes. « Ça rend accessible une certaine forme de littérature, et surtout, je pense que ça change la manière dont certains et certaines chercheur•euses écrivent aussi. Parce qu’on voit aussi de plus en plus de personnes dont c’est le métier, la recherche, qui écrivent des livres accessibles pour le public, et non plus pour elles-mêmes, pour le milieu. »

Faiminisme : une boîte à outils accessible et militante

Un jour, en dédicace, une très jeune étudiante a confié à Nora Bouazzouni que la lecture de Faiminisme l’avait bouleversée, et surtout, qu’elle en ressortait avec des outils et des chiffres pour contrer les remarques sexistes de sa famille. « J’aimais cette idée-là, de donner de quoi pouvoir répondre », souligne la journaliste. « Moi, c’est ça que j’aime bien quand j’écris des livres, c’est que ce soit une forme de boîte à outils. »

C’est l’une des choses qui expliquent que la question de l’accessibilité lui tenait à cœur dès les prémices de l’écriture de son premier essai. Elle relie également cet objectif à son parcours dans le métier. Formée à France info, où elle a obtenu son premier poste de journaliste, elle a participé au lancement du site web dont le « mot d’ordre [était] d’être accessible », pour remplir sa mission de service public. Mais elle avait aussi une autre source de motivation, plus personnelle : « J’avais envie que mes livres soient accessibles aussi à mes parents », explique-t-elle, « qu’ils puissent lire mes livres, qu’ils ne se sentent pas bêtes devant des mots et qu’ils comprennent tout ce qui est écrit. » Elle ajoute qu’elle « espère écrire toujours des livres qui seront accessibles à tout le monde », même si elle concède que son troisième essai l’est probablement un peu moins.

Elle est en effet issue d’un milieu ouvrier ; ses parents ne lisaient pas la presse, « à part 20 minutes dans le métro à l’époque », et écoutaient RTL2, « pas de radio d’intellectuel•les ». Sa mère adorait cependant lire d’autres registres, notamment des romans policiers. C’est d’elle que la jeune femme tient le goût de la lecture, depuis toute petite. Adolescente, en plus de Jeune et Jolie, Nora Bouazzouni lisait d’ailleurs les magazines auxquels sa mère était abonnée. Femme actuelle était le seul féminin, selon elle « un peu “moins pire” que les autres [concernant la grossophobie], mais qui reste un féminin typique qui vous parle uniquement d’un point de vue hétérosexuel, avec que des femmes blanches dedans ». Elle note que « maintenant, ça s’est un peu amélioré, mais ça parle toujours de minceur, d’avoir l’air plus jeune et de minceur ». Une raison de plus d’écrire Faiminisme.

Entre sentiment d’illégitimité et désir d’authenticité

Nul doute que l’efficacité de ce court essai d’une centaine de pages tient en partie à son style simple et direct. Nora Bouazzouni revendique cette spécificité journalistique en relatant qu’elle s’est retrouvée bloquée au beau milieu de la rédaction de l’ouvrage, quand elle a réalisé qu’elle « se regardait écrire », et qu’elle n’a réussi à retrouver l’inspiration qu’en acceptant de se détacher des tournures d’universitaire qu’elle cherchait à reproduire : « À un moment donné, je me suis prise trop au sérieux. J’étais en train de m’auto-congratuler. Et c’est pas moi ça, je fais pas ça pour ça. Donc j’ai tout effacé et j’ai réécrit comme c’est. » Elle doit en partie sa confiance en son approche de l’écriture à son expérience chez Slate, où elle a travaillé en tant que traductrice avant de devenir journaliste, et où « il n’y avait pas ce truc où on se prend méga au sérieux ».

Et la touche humoristique, justement ? « C’est parce que c’est mon caractère, c’est comme ça que je parle, c’est comme ça que je suis. Je fais des blagues et j’avais pas envie d’endosser un rôle. » C’est d’ailleurs son authenticité que recherchait avant tout sa maison d’édition, qui appréciait particulièrement sa plume. « Je n’avais pas envie d’écrire un livre de sociologue, car je ne suis pas sociologue, et je ne suis pas universitaire non plus, je ne suis pas une chercheuse. Donc c’est un livre de journaliste », affirme-t-elle.

Un livre qui est né, entre autres choses, d’un sentiment d’illégitimité qu’elle ressentait plus jeune face aux productions littéraires dans le domaine des sciences sociales. « J’avais vraiment l’impression que pour lire des essais, notamment de sociologie, il fallait avoir fait des études de sociologie, ou bien être dans l’élite, les classes dominantes parisiennes qui lisent Le Monde, qui écoutent France Inter et France Culture », explique-t-elle. Celle qui, entre-temps, a travaillé pour Mediapart, Urbania ou encore Rue89, a mis un terme à ses études après une licence d’anglais – plus tard que ses parents, qui ont arrêté l’école à quatorze ans –, n’a « aucun background » en sociologie et n’a pas non plus fait d’école de journalisme. Si elle a toujours aimé lire de la fiction, elle a très longtemps pensé que la littérature scientifique n’était pas à sa portée, « que c’était juste pour les universitaires, et surtout pour les bourgeois », et qu’elle ne la comprendrait pas si elle essayait. En tout cas, précise-t-elle, elle est « très contente de vivre à une époque où les journalistes peuvent écrire des livres ».

Des conseils pour se détacher des injonctions sur le physique des femmes ?

Elle semble amusée par la question. « J’ai pas de conseils… Quand t’es journaliste, t’es dans les constats, pas les conseils. C’est les magazines féminins qui donnent des conseils. » Elle considère qu’il est « impossible » et même « obscène et indécent » de conseiller les femmes pour qu’elles puissent s’émanciper de leur inquiétude concernant leur physique, « dans une société qui te dit que de toute façon, ton corps est en travaux perpétuels et il ne sera jamais assez bien, […] donc continue de te sentir comme une merde parce que ça arrange bien l’industrie cosmétique, le capitalisme et le patriarcat. Parce que si on a trop confiance en nous… ça risque de faire des étincelles. »

Sa propre apparence physique, « à titre très personnel », elle nous avoue que plus elle « vieillit », plus elle « s’en bat les steaks ». Elle a cependant aussi conscience que ce n’est pas immuable, surtout que de nombreuses femmes sont angoissées à l’idée de prendre de l’âge. « Je serais bien mal placée, vu la gueule que j’ai, de donner des conseils à des femmes qui ont peur de vieillir. Reparlons-en dans 10 ans ! » Elle a du moins arrêté de vouloir incarner la féminité consensuelle, par exemple, en abandonnant les vêtements inconfortables. Un choix éclairé auquel la société la renvoie pourtant en permanence. « Mes cheveux courts, on m’en parle tout le temps ! J’ai les cheveux courts depuis 2009 ou un truc comme ça, et on m’en parle tout le temps. On me dit que c’est courageux d’avoir les cheveux courts pour une fille. » La « terreur » qu’éprouvent les femmes en s’imaginant couper leurs cheveux l’intéresse beaucoup. « Est-ce que les hommes sont terrifiés d’aller chez le coiffeur ? » insiste-t-elle. « On met notre féminité dans tellement de choses physiques. Les hommes mettent leur masculinité dans tellement de choses pas forcément physiques. »

Alors non, Nora Bouazzouni n’a pas de conseils à vous donner pour arrêter de vous prendre la tête avec votre corps… mais beaucoup de réflexions à soulever concernant l’intérêt qu’on peut trouver à maîtriser la performance de genre. « Parfois, j’ai envie de performer ce rôle-là [de la féminité stéréotypée] », concède-t-elle. « Mais juste pour moi. […] Après, j’ai jamais été dans l’hyperféminité, ça n’a jamais été mon truc. J’ai essayé mais ça ne marche pas, c’est pas moi. »

La performance de genre, entre un atout et une question de survie

Dans notre société actuelle, si la performance de genre peut être perçue comme un jeu, elle peut même se révéler utile dans certaines situations, notamment dans le cadre professionnel. « Parfois, je performe la féminité traditionnelle quand je suis avec des interlocuteurs que j’ai envie de convaincre… Quand je vais être avec des vieux hommes blancs cis [non trans, ndlr] », précise la journaliste. « Je vais être hyper souriante et leur dire des trucs quand même un peu hardcore. Ça permet de faire passer des messages. […] C’est une violence ! Je ne dis pas le contraire. Mais il y a des endroits et des situations où ça peut nous être favorable. » Elle rappelle toutefois que pour nombre de personnes, l’enjeu de cette performance est tout autre : c’est parfois « une question de survie », comme cela peut par exemple être le cas pour certains hommes homosexuels considérés comme « efféminés », qui se contraignent à changer de voix ou de démarche lorsqu’ils rentrent chez eux pendant la nuit, afin d’éviter d’être passés à tabac s’ils sont perçus comme manquant de virilité. Nora Bouazzouni rapproche ce phénomène du code-switching employé par les personnes Noires aux États-Unis, qui naviguent par exemple entre plusieurs registres de langue selon si elles sont en compagnie de leur communauté ou si elles s’adressent à des personnes blanches. En France, dit-elle, un mécanisme similaire peut s’appliquer pour les hommes racisés (pouvant subir du racisme) lors des contrôles de police.

Elle a elle-même expérimenté l’exclusion au sein de la communauté LGBT+ dont elle fait partie, particulièrement au moment où elle a quitté sa province d’origine pour monter à Paris, car elle n’en possédait pas encore les codes. « À l’époque, je me suis rendu compte que j’étais trop féminine pour le milieu lesbien. J’ai entendu des phrases comme – vraiment, je l’ai entendue, cette phrase, en soirée : “C’est qui, la petite hétérote qui s’est perdue ?” Alors que moi, enfin, j’étais contente d’avoir une communauté », raconte-t-elle. Selon elle, les cercles lesbiens, où l’androgynie est largement majoritaire, ne sont pas non plus exempts de discrimination : il y a « des codes qui sont excluants depuis très longtemps. Ça existe depuis le vingtième siècle, l’exclusion des lipsticks et des fems [termes qui désignent les lesbiennes dont l’expression de genre est plus féminine, ndlr]. C’est de la femphobie, finalement. » Dans ce milieu, explique la jeune femme, la discrimination qui subsiste est aussi particulièrement liée au poids. « Moi, je suis bie, mais il y a beaucoup de grossophobie dans les milieux lesbiens aussi. Toutes les femmes gouines qui sont grosses en parlent. Toutes les femmes qui ne sont pas conformes. [Le terme « gouine » n’est ici pas utilisé dans un sens péjoratif, mais dans une logique de retournement de stigmate fréquente dans la communauté LGBT+, ndlr] Les gouines grosses, les bies grosses et les pans grosses le disent toutes, il y a une vraie grossophobie. Même dans les milieux queer, il y a de la grossophobie, mais comme il y a de la transphobie, comme il y a du racisme, du validisme… Évidemment, ce n’est pas un milieu qui est totalement hermétique aux discriminations quelles qu’elles soient. »

Après deux essais consacrés à la question de l’intersection entre genre et alimentation, Nora Bouazzouni se concentre dans son troisième livre sur la relation entre nourriture et domination économique. Mangez les riches, la lutte des classes passe par l’assiette est en librairie depuis le mois d’octobre.

Entretien : ETR & PAL

Texte : PAL

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Grandes interviews

Grande Interview – Rencontre avec Corine Pelluchon

Corine Pelluchon, professeure de philosophie politique et d’éthique appliquée à l’université Gustave Eiffel, a accepté un échange avec nous de propos autour de son livre Les Nourritures – Philosophie du corps politique. Elle a reçu le prix Günther Anders de la pensée critique en 2020 et a été promue au rang de Chevalière de la Légion d’Honneur en 2021. On retrouve son énergie dans tous ses ouvrages, lesquels témoignent de sa passion pour les sujets qui la poussent à écrire. Ses œuvres reflètent une personne ayant une expérience riche et une sensibilité très grande. Après une quinzaine de livres qui témoignent d’une grande cohérence, elle vient de passer deux ans en Allemagne. Pour elle, partir à l’étranger permet de parler d’autres langues, de découvrir d’autres cultures et de prendre un peu de distance par rapport à son pays et à soi-même. Corine Pelluchon a acquis une certaine légitimité et ses ouvrages sont traduits dans plusieurs langues. Elle a conduit un travail de terrain pendant plusieurs années sur la fin de vie et l’éthique médicale, mais aussi auprès de nombreux acteurs impliqués dans le domaine de l’alimentation, de l’agriculture et de l’élevage, et a été auditionnée une vingtaine de fois par des représentants politiques pour des questions de société liées à la bioéthique, au rapport aux animaux et à l’écologie. Elle alterne des ouvrages de fond et des ouvrages destinés à un plus grand public et donne régulièrement des conférences en France et à l’étranger.

Être une philosophe

Nous avons débuté l’échange autour du fait d’être une philosophe aujourd’hui dans notre société. Comment le devenons-nous ? On voit que, pour elle, faire de la philosophie permet de poser des problèmes et de proposer sinon des réponses, du moins des pistes de réflexion aidant à affronter les défis actuels. L’origine de la philosophie est l’inquiétude. Celle-ci l’a conduite à philosopher sur la fragilité de la démocratie, sur la destruction de l’environnement et l’érosion de la biodiversité et sur les problèmes éthiques, politiques et existentiels associées à notre habitation de la Terre et à nos rapports aux animaux. Corine Pelluchon s’inscrit dans une longue lignée de philosophes.  En entretien tout comme dans ses livres, elle évoque ses prédécesseurs, notamment le philosophe Emmanuel Levinas. Ses travaux s’inscrivent aussi dans le sillage des Lumières, mais elle aborde ces dernières de manière critique, comme on le voit dans son livre Les Lumières à l’âge du vivant (Seuil, 2021) mais aussi dans sa thèse sur Leo Strauss (Leo Strauss, une autre raison, d’autres Lumières, Vrin, 2005).  Leo Strauss est un philosophe juif allemand qui assiste à l’effondrement de la République de Weimar et à la montée du nazisme et conduit une critique de la modernité en soulignant la nécessité, pour contrer la déshumanisation et résister au retournement de la démocratie contre elle-même, d’une éducation philosophique et morale exigeante. Cette interrogation demeure un fil directeur pour Corine Pelluchon. Cependant, juste après sa thèse, elle part un an aux USA et s’oriente vers les problèmes liés aux pratiques médicales, aux biotechnologies ainsi qu’à nos rapports aux animaux et à la nature.  Autant de questions qui supposent d’examiner à nouveaux frais la manière dont nous pensons l’humain et de s’interroger sur les conditions permettant d’y répondre de manière démocratique. Selon elle, le rapport aux animaux est important en lui-même et il a aussi une dimension stratégique, révélant ce que nous sommes devenus ou ce que notre modèle de développement a fait de nous : la maltraitance animale, qui est, à ses yeux, une figure du mal, pointe les dysfonctionnements et les contradictions de notre société et souligne la violence extrême que nous acceptons d’infliger à d’autres êtres sensibles. Ainsi, la philosophie aide à concevoir des pistes de réflexion pour renouveler la compréhension que nous avons de nous-mêmes et de notre condition, que Corine Pelluchon pense en insistant sur notre vulnérabilité et notre dépendance à l’égard des éléments, des écosystèmes et des autres vivants. Il importe également de prendre conscience à la fois des obstacles au changement social et des leviers pouvant nous amener à opérer la transition écologique et solidaire qui est nécessaire pour éviter l’effondrement.

Nous avons continué l’échange autour de son ouvrage Les Nourritures publié aux éditions du Seuil en 2015 puis une nouvelle fois publié en format de poche en 2020. Il s’agit d’un livre solaire, porté par une certaine énergie. Les Nourritures est un ouvrage apportant des pistes de réflexion fondamentales pour penser la condition terrestre de l’humain et faire entrer l’écologie et la justice envers les animaux dans la démocratie. L’écologie est articulée à une philosophie de l’existence qui prend comme point de départ notre besoin de manger, le fait que « vivre » est toujours « vivre de » et « vivre avec ». La citation suivante illustre cette idée : « Manger est un acte économique, moral et politique. » Trois ans plus tard, elle publie Éthique de la considération (Seuil, 2018) qui est la suite des Nourritures : l’auteure, après avoir montré les implications éthiques et politiques de sa philosophie du « vivre de » et des nourritures, s’interroge sur les motivations concrètes qui poussent les individus à agir. Elle se demande quelle transformation de soi peut réduire le décalage entre la théorie et la pratique, la pensée et l’action, qui est l’un des défis majeurs, de nos jours, puisque cette prise de conscience, bien que beaucoup reconnaissent la réalité et la gravité du réchauffement climatique et admettent l’importance du bien-être animal, n’est pas suivie de changements réels dans les styles de vie et les modes de production.

Comment arriver à motiver les individus afin qu’ils aient un désir de changer ?

Éthique de la considération s’interroge sur les manières d’être des personnes et sur le lien entre représentations, valeurs ou évaluations, émotions et comportement qui pourraient nous permettre d’être plus sobres, d’avoir du plaisir à changer nos styles de vie et à répondre aux défis actuels de manière démocratique. Pour Corine Pelluchon, la considération renvoie à un processus de transformation de soi qui conduit le sujet à reconnaître son appartenance au monde commun, qui est lié aux générations passées, présentes et futures et au patrimoine naturel et culturel et forme une transcendance dans l’immanence. Cette prise de conscience, qui est en réalité une expérience qu’elle appelle transdescendance, s’effectue en approfondissant la connaissance de soi comme être charnel, vulnérable et engendré, et modifie en profondeur le sujet. Ses aspirations et ses affects changent. Percevant l’épanouissement des autres vivants comme une composante de son propre épanouissement, il n’a plus envie de les dominer. La considération, qui est le contraire de la domination, implique que l’on ait comme horizon de ses pensées et de ses actions le désir de transmettre un monde habitable. 

Dans Les Nourritures, Corine Pelluchon pense l’écologie comme la sagesse de notre habitation de la Terre qui est toujours une cohabitation avec les autres, humains et autres qu’humains. L’écologie possède donc une dimension sociale, liée au partage des nourritures et à la manière dont nous cohabitons. Elle a aussi une dimension existentielle associée à la manière dont nous nous comprenons, ce qui est inséparable, de nos jours, d’une réflexion sur le caractère destructeur de nos modes de production et sur les souffrances que nous infligeons aux animaux. La philosophie offre des concepts et un questionnement complexe qui ressort de l’écologie politique, même si ce travail se distingue du militantisme et de ce que font les partis politiques.

Dans Les Nourritures, l’auteure insiste sur l’essence généreuse du monde. En effet, les aliments ne sont pas des objets de représentation et leur saveur est plus riche que ce que nous pouvons décrire par le concept. De plus, nous ne mangeons pas seulement pour satisfaire nos besoins, mais, en mangeant, il y a une dimension de plaisir, une manière de savourer les aliments qui illustre cet excédent du sentir.  « La vie est aimée et est elle-même sa propre fin », écrit-elle en citant Levinas. Il importe de tenir compte de ce que révèle le plaisir attaché aux choses sensibles, leur richesse, leur excédent qui va au-delà du besoin et fait la grâce de la vie. Ainsi, Corine Pelluchon écrit : « En insistant sur le plaisir attaché au fait de vivre et en associant la justice à la convivialité, cette philosophie promeut un humanisme de partage, selon lequel mon bonheur ne dépend pas seulement de ce que je possède et m’approprie, mais également de la place que j’accorde aux autres êtres humains et non humains, ainsi que de la transmission d’un monde commun » (Les Nourritures, p. 328).

Manger comme acte social total : « Vivre de … »

Manger renvoie à l’oralité. En effet, cet acte est une incorporation, puisque quelque chose d’extérieur vient à l’intérieur de soi. Les troubles de l’alimentation sont aussi des troubles d’oralité, au sens où il y a un refus d’incorporer ou à l’inverse une volonté de se remplir en se jetant sur la nourriture. Ainsi, l’existence n’est pas seulement à penser à la lumière du projet, mais il importe d’insister aussi sur sa dimension de réceptivité. Cette porosité entre moi et le monde renvoie à une philosophie du sentir qui met au jour notre être-avec-le-monde-et-les-autres. Le fait de manger est un fait social total, à la fois biologique et culturel, intime et culturel, voire symbolique, et il a une signification éthique et politique sur laquelle l’auteure des Nourritures insiste plus particulièrement. Afin d’expliciter son propos, elle écrit :« Manger est un dire (…) Quand je mange, je dis la place que j’accorde aux autres, humains et autres qu’humains, au sein de mon existence (…) Je dis si j’assigne des limites à mon bon droit au nom du droit des autres à exister (…). Je montre si je suis prête à faire couler le sang des bêtes, à tolérer le gavage des oies, pour un plaisir substituable ».  Plutarque exprimait l’idée que l’alimentation carnée n’est ni naturelle ni nécessaire et que la violence imposée aux animaux est injuste et disproportionnée. Enfin, la faim ou la malnutrition ne sont pas liées essentiellement à des pénuries, mais à des problèmes de justice, de spéculation, d’accès à la nourriture disponible.

Propositions liées à l’ouvrage

La protection de la biosphère, la justice envers les autres, humains et autres qu’humains, et la préservation de la biodiversité sont entrées dans la politique, mais les changements menant à des transformations dans les modes de production et de consommation et sur le plan des structures sociales et économiques sont difficiles à effectuer. La pesanteur des habitudes et surtout les intérêts économiques constituent des obstacles. De manière générale, même quand l’humain sait quel est son bien, il ne le fait pas forcément. Comme Hobbes l’a montré, les hommes ne veulent pas forcément aujourd’hui ce qu’ils ont voulu hier. Ainsi, si la protection de la biosphère est une condition de notre existence et s’impose comme un nouveau devoir de l’État, il importe d’en faire une norme, de revenir pour cette raison à l’idée du contrat social. La deuxième partie des Nourritures présente ainsi un nouveau contrat social. Ce dernier ajoute aux finalités classiques du politique, c’est-à-dire à la coexistence des libertés et à la réduction des inégalités, la protection de la biosphère, la justice envers les générations futures et les autres espèces, le bien-être animal et la convivialité, le fait que vivre n’est pas seulement survivre, mais avoir du plaisir à vivre.  Dans ses autres ouvrages, Corine Pelluchon s’interroge sur les conditions permettant concrètement d’arriver à des améliorations de la condition animale dans une démocratie pluraliste, où les individus n’ont pas les mêmes intérêts ni les mêmes représentations (Manifeste animaliste. Politiser la cause animale, Alma, 2017 et Rivages, 2021). Elle s’interroge aussi sur les moteurs du changement social et sur les conditions faisant de la transition écologique un projet d’émancipation et une chance, et pas seulement un fardeau (Les Lumières à l’âge du vivant).

Parler d’espérance aujourd’hui, est-ce possible ?

Parfois, un sentiment d’impuissance face à la situation climatique et politique actuelle se fait sentir. On parle d’éco-anxiété pour traduire les émotions liées à ce sentiment de ne pas voir l’avenir, d’avoir l’impression que le pire se produira et que personne ne réagira à temps. Le risque est alors de se laisser submerger par des émotions négatives. Pourtant, l’origine de d’éco-anxiété est le désir que l’humanité soit à la hauteur des défis actuels, comme l’a montré l’auteure dans L’espérance, ou la traversée de l’impossible (Rivages, 2023). Cette noble origine (l’amour du monde et la peur pour lui) doit être soulignée ainsi que le fait que les éco-anxieux refusent le déni. Ce sont des sentinelles, pas seulement parce qu’ils avertissent des dangers, mais parce qu’ils témoignent du fait que la situation actuelle exige une remise en question profonde de nos schémas de pensée. Pour ne pas s’effondrer intérieurement, il est cependant important de s’entourer et de partager ses émotions, afin de ne pas seulement regarder ce qui ne va pas, mais d’être aussi attentif à celles et ceux qui agissent, font des choses utiles, et mettent ainsi en œuvre les idées exprimées dans Les Nourritures.

Le livre Les Nourritures est une plongée dans la pensée riche, construite et exigeante de Corine Pelluchon. Nous concluons notre échange avec une citation extraite de son ouvrage Réparons le monde. Humains, animaux, nature (Rivages, 2020) : « La prise en compte de la dimension écologique doit faire partie de toute réflexion sur la condition humaine ».

Interview : PAL et ETR

Texte : ETR

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Qui suis-je ?

 “Qui suis-je ?” 

 Je suis née le 29 décembre 1991 aux Lilas en Seine-Saint-Denis. J’ai grandi dans le sud de la Seine-et-Marne à la campagne. 

 Je suis allée  au lycée  à  Fontainebleau,  j’ai  fait  beaucoup  de  musique  et  lorsque  j’avais  quinze  ans,  j’ai  participé  au  programme  Voltaire  qui  est  un  programme  d’échange  avec  l’Allemagne.  J’ai  passé  six  mois  à  Chemnitz,  en  Saxe.  Ce  séjour  m’a  beaucoup  plu,  et  c’est  une  des  raisons  pour  lesquelles  j’ai  fait  de  l’allemand  par  la  suite.  J’aimais  bien  le  rythme  en  Allemagne,  le  fait  qu’on  aille  en  cours  pendant  quelques  heures  et que  l’on  aille après pratiquer  la  musique  au  conservatoire.  Au  lycée,  je  participais  aussi  au  chœur  des  germanistes,  donc  nous  chantions  en  allemand.  C’est  une  langue  que  j’ai  chantée  avant même de  la  comprendre.  C’est  pourquoi  apprendre  à  bien  prononcer  est  important  à  mes  yeux.  Je  crois  que  c’est  un des aspects les plus importants en langues vivantes étrangères, et l’on insiste assez peu là-dessus. 

Après le lycée, j’ai une classe préparatoire littéraire au lycée Henri IV à Paris. C’était important pour moi de conserver toutes les matières littéraires, car je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire. À la fin de mon hypokhâgne, j’ai longuement hésité à choisir ma spécialité entre l’anglais et l’allemand. J’ai finalement choisi l’allemand, tout simplement parce que j’adorais le professeur d’allemand. J’ai ensuite intégré l’ENS de Lyon à l’issue de ma prépa, où j’ai commencé par faire de la recherche sur la musique. Puis, en master, j’ai commencé à travailler sur la réception de la musique sacrée en RDA et sur la figure de Bach. En M2, je suis partie en Erasmus à Dresde. J’ai fait mon mémoire sur le « Thomanerchor » de Leipzig et le « Kreuzchor » de Dresde ; ce sont deux chœurs d’enfants. Par la suite, j’ai été assistante de langue dans un lycée à Chemnitz.  Cette expérience m’a beaucoup plu et c’est d’ailleurs là que j’ai décidé que je voulais enseigner. 

Quand je suis rentrée en France, j’ai préparé l’agrégation d’allemand. L’anglais étant tout aussi important pour moi, j’ai décidé de prendre deux années sabbatiques pour être jeune fille au pair à Londres. J’ai également suivi un master de littérature comparée au « Trinity  College » à Dublin. Après ça, je suis revenue en France et je me suis inscrite en thèse à Caen. Dans mon sujet de recherche, je me suis intéressée à la biographie langagière, c’est-à-dire la place des langues en tant qu’objet littéraire affectif, autrement dit selon son itinéraire personnel.

Je me suis ensuite retrouvée à enseigner à l’université de Caen pendant trois ans.  L’année suivante, j’ai enseigné à des grands débutants en allemand à l’université Gustave Eiffel à Champs-sur-Marne. Et puis l’année d’après, je suis arrivée à la Sorbonne Nouvelle. C’est donc la première année où j’enseigne la littérature allemande et la littérature comparée dans cette université. Je me prépare en même temps au CAPES et à l’agrégation. 

Pour ce qui est de mes travaux de recherche actuels, j’ai publié un ouvrage sur l’enfant plurilingue en littérature. J’organise également un séminaire dans le cadre du congrès de l’association américaine de littérature comparée à Montréal au Québec. Je suis contente car j’ai reçu des propositions de chercheurs du monde entier qui travaillent sur le mélange des langues dans le récit de soi. 

En ce qui concerne mes loisirs, je continue de chanter à la chorale. Sinon, je joue du piano et je suis engagée dans des associations dans le domaine de la protection de l’enfance car ce sujet me tient à cœur. J’adore les chats, j’en ai beaucoup, et comme j’ai la chance d’habiter à la campagne, ils peuvent entrer et sortir de chez moi comme ils le souhaitent. 

Enfin, ce qui me plaît à la Sorbonne Nouvelle, c’est de pouvoir mêler l’enseignement et la recherche. C’est aussi la première fois qu’on me propose de faire des cours sur mes sujets de recherche. Ce que j’apprécie également, c’est que les collègues parlent de recherche entre eux. Je trouve d’ailleurs qu’ici les gens ne se prennent pas trop au sérieux, tout en se montrant quand même très intéressés et curieux. Voilà, je pense que le mot-clé, c’est la curiosité. En matière de recherche, c’est très novateur et il y a une dimension internationale très importante également. 

Annika LENK, Maxime PHELEP, Ismaël VELMIR

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Lettre de…

Rubrique : Lettre de… 

Hallo zusammen! 

Je m’appelle Martin, et j’ai une grande passion… l’Allemagne ! 

Après avoir étudié pendant trois ans pour obtenir ma licence en études interculturelles franco-allemandes à Paris 3, j’ai décidé de m’installer définitivement en Allemagne, à Brême, où je vis depuis sept mois. Lorsque j’ai commencé à étudier l’allemand, je n’avais pas « seulement » l’objectif d’apprendre quelque chose de nouveau, mais je voulais vraiment que cela devienne la nouvelle langue de ma vie quotidienne, et c’est ce qui s’est passé. 

Tout a commencé il y a deux ans, lorsque j’ai passé toute ma L2 à Berlin, qui est une grande ville dispersée, alors que Brême (qui ressemble quand même à Berlin) est plus à l’échelle humaine, tout en restant vaste et pleine d’activités intéressantes à faire… Un bon compromis ! Trouver un logement ici n’a pas été facile, mais heureusement mon copain y habitait déjà et cela m’a beaucoup aidé, sans oublier une bonne dose de patience et une grande volonté. 

L’expérience à Berlin a été intéressante et enrichissante, mais malheureusement c’était l’année du Covid et par conséquent nous sommes très peu allés à l’université : au début nous n’avions que 15 heures en présentiel par semaine (ce qui était déjà irrégulier), et à partir de janvier nous sommes passés à 100 % en distanciel. De plus, trouver un logement à Berlin est très complexe, et je me suis retrouvé à Studentendörf, une résidence universitaire inconfortable et éloignée du centre, ce qui a rendu plus difficile de faire de nouvelles connaissances et découvrir la ville. 

L’université en Allemagne est très différente de celle en France : tout d’abord, tous les domaines sont sur le même campus, il est donc immense et il faut beaucoup marcher pour trouver les salles de cours, en essayant de ne pas se perdre ! Mais cela permet de faire du sport en même temps, et on a aussi la possibilité de suivre un cours sans être obligés d’y assister et de passer des examens, mais juste pour le plaisir. L’université est pleine d’espaces verts et de détente, et d’espaces encore plus immenses où l’on peut s’arrêter pour étudier ou discuter. Quant aux cours, il était difficile de les suivre en allemand, surtout le cours de droit ; il y a à la fois des cours magistraux avec un grand nombre d’étudiants et des TD ; nous étions 400 dans le cours de droit, mais sinon nous n’étions pas nombreux dans mon département. En plus des cours, bien sûr, les examens étaient aussi principalement à distance, sauf si les professeurs demandaient des DM ; les passer dans ce mode était compliqué et stressant : les professeurs nous demandaient d’utiliser des serveurs spéciaux pour ne pas tricher, et en plus il y avait souvent des problèmes de connexion. Une autre différence avec la France est la relation entre les professeurs et les étudiants : il y a plus de distance et de « froideur », et si quelqu’un a besoin d’aide, il doit demander, on ne l’accompagne pas forcément. 

Et maintenant ? Qu’est-ce que je fais dans la vie ? Je travaille dans un restaurant à chats, pour m’introduire dans le secteur qui me fait rêver. Un jour, j’aimerais ouvrir mon propre salon de thé, unique et original, animé par de nombreux chats et enrichi de nombreux livres ; mais pas seulement : ce serait une pâtisserie française typique ici en Allemagne. 

Après ma licence de langues, j’ai réalisé ma passion et j’ai suivi une formation dans le secteur culinaire. D’ailleurs, parmi les différences culturelles qui m’ont le plus frappé entre la France et l’Allemagne, il y avait justement celles liées à la nourriture : j’ai l’impression que les Français mangent davantage pour le plaisir et le goût, alors que les Allemands ont tendance à privilégier ce qui est beau, comme les fruits et les légumes, qui sont pourtant souvent sans goût. 

Autres différences ? Les Allemands sont beaucoup plus ouverts et moins railleurs, ici il y a peu de manifestations et la vie est plus calme. En revanche, certains sujets sont tabous, comme le nazisme et la Seconde Guerre mondiale ; les événements liés à cette période historique rendent les Allemands plus pudiques sur leur histoire, alors que les Français en sont très fiers.

Ma vie est ici maintenant, et c’est ici que j’imagine mon avenir personnel et professionnel ; avoir l’opportunité de vivre et de connaître deux pays, deux langues et deux cultures très différentes, bien que proches géographiquement, est une expérience stimulante et enrichissante, que je recommande vivement à tous ceux qui en ont l’envie et la volonté. 

A bientôt, peut-être dans mon salon de thé avec les chats ! 

Viele Grüße aus Bremen! 

                                                                                – Martin 

CAM

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Livres

Compte-rendu de lecture du n°18 : « Les politiques linguistiques et la langue de la politique : l’allemand et le kiswahili dans l’Afrique Orientale Allemande, 1885-1918. », Kyra Levine.

Thèse dirigée par le Prof. Dr. Andreas Eckert (Humbold-Universität zu Berlin) et la Prof. Fr. Céline Trautmann-Waller (Université Sorbonne Nouvelle). Soutenue le 7 décembre 2015 par Kyra Levine.

Dans sa thèse en Histoire soutenue en 2015 à l’Université Sorbonne Nouvelle, Kyra Levine s’attelle à un sujet passionnant mais largement méconnu : le choix du kiswahili comme langue administrative et d’instruction dans l’Afrique Orientale Allemande (Deutsch Ostafrika). 

Le kiswahili est la langue africaine la plus enseignée dans le monde, langue véhiculaire en Afrique de l’Est, langue de travail de l’Union africaine. C’est une langue bantoue dont les locuteurs se concentrent en Ouganda, au Kenya, en Tanzanie, à l’île de Zanzibar et aux Comores, sans oublier au Rwanda, au Burundi, en Somalie, en Zambie et en Afrique du Sud. Née du brassage des populations littorales commerçant avec le golfe arabo-persique et l’Inde, son extension a été favorisée par plusieurs facteurs. D’une part, la traite des esclaves a fait du kiswahili la langue des négriers se déplaçant entre la côte et les terres, contribuant à sa diffusion. D’autre part, les Etats nouvellement indépendants de la Tanzanie (1961) et du Kenya (1963) ont voulu concurrencer l’anglais et construire une nation autour de leur langue propre et prestigieuse, le kiswahili.

L’expansion de l’aire linguistique swahilie tient également aux politiques linguistiques de l’administration coloniale allemande de la région. Les colonies allemandes sont nées d’initiatives d’individus portés par le projet de créer des colonies de peuplement allemandes ; ils craignaient en effet que les nombreux Allemands émigrant vers le continent américain perdent leur « germanité »  en s’assimilant à la culture de leur pays d’accueil. Otto von Bismarck, chancelier du Deuxième Reich entre 1871 et 1890, cerveau de la politique intérieure et étrangère du nouvel Etat, dut néanmoins composer avec les lobbys en faveur de la colonisation, menés par des personnages excentriques, comme Carl Peters. Le chancelier ne souhaitait initialement pas créer des colonies outre-mer, car elles seraient un poids économique considérable pour une Allemagne qui s’industrialisait lentement et une source de tensions probable avec la Grande-Bretagne, qui voulait contrôler l’Afrique du Caire au Cap. Carl Peters, aventurier et membre d’un club prônant la création de colonies de peuplement, alla néanmoins de l’avant : il fit signer dès 1884 des contrats de cession de territoire à des chefs de la côte au nom du gouvernement allemand et mit Bismarck devant le fait accompli. Celui-ci voulut brider Peters et mit les nouveaux territoires allemands sous le contrôle de la Deutsch-Ostafrikanische Gesellschaft, la Compagnie de l’Afrique Orientale Allemande, créée à l’occasion en 1887. Un soulèvement d’ampleur l’année suivante entraîna la prise en main de la colonie par le gouvernement allemand, qui envoya alors des administrateurs sur place. L’administration coloniale dans toutes les colonies allemandes se caractérisa par une forte autonomie locale, due à une décentralisation et à l’absence de politique globale impulsées par Berlin. Ainsi, tandis que le général Lothar von Trotha, qui faisait face à des résistances de la part des populations des Hereros et des Namas dans la colonie Deutsch Südwestafrika (l’actuelle Namibie), ordonna l’extermination de ces peuples (1904-1908), le gouverneur de Samoa entre 1900 et 1912, Wilhelm Solf adopta les coutumes locales de l’île. La marge de manœuvre des gouvernants locaux était donc grande.

La politique linguistique des autorités locales en Afrique orientale allemande peut paraître surprenante aux lecteurs et lectrices contemporaines : là où les empires coloniaux français et britannique privilégiaient la langue métropolitaine dans l’administration de leurs colonies et l’instruction des colonisés, le choix des gouverneurs allemands de la Deustch Ostafrika se porta sur le kiswahili. Ils étaient en effet démunis face à la multiplicité des langues parlées en Afrique de l’Est, et ils considéraient le kiswahili comme la langue d’une civilisation plus « avancée » que ses voisines, en raison de son cosmopolitisme et ses productions littéraires. Un nationalisme sous-jacent est aussi à l’œuvre dans cette stratégie, puisque les colons gardaient le monopole de la langue allemande, contribuant ainsi à les séparer clairement des colonisés, car certains Allemands craignaient une Verkafferung, une dégénération de la soi-disant pureté allemande au contact des populations indigènes. Enfin, les Allemands ne prétendaient pas être porteur d’une quelconque « mission civilisatrice » qui imprégnait le discours colonial français ; leur but était d’exploiter le plus efficacement possible la main-d’œuvre locale, en s’assurant qu’ils connaissaient tous la même langue. 

Cette politique linguistique n’alla pas sans susciter de résistances de la part de missionnaires préférant l’enseignement des langues tribales, moins « islamisées » que le kiswahili, et de patriotes enthousiastes. Elle fut aussi un outil dont les colonisés tirèrent profit. En effet, le système éducatif en kiswahili favorisa la création d’une classe moyenne et d’une bourgeoisie africaine éduquées, dont la conscience nationale se développa progressivement et joua un rôle clé dans la création du nouveaux Etats-nations. 

En effet, après sa défaite lors de la Première Guerre Mondiale, l’Allemagne dut céder ses colonies à ses vainqueurs : la Deustch Ostafrika fut divisée entre les Belges, qui s’emparèrent du Rwanda-Urundi, le Portugal, qui obtint la région du Kionga, et les Britanniques, qui reçurent le reste qu’ils baptisèrent Tanganyika ; l’archipel de Zanzibar obtint le statut de protectorat, soit le maintien du gouvernement local, combiné à la mainmise britannique sur la politique étrangère et militaire. Le Tanganyika obtint son indépendance en 1961, le Zanzibar s’émancipa en 1963 de la tutelle britannique ; en 1964, les deux nouveaux Etats, ainsi que leurs noms, fusionnèrent pour former la Tanzanie. Le premier président tanzanien Julius Nyerere, au pouvoir entre 1964 et 1985, s’appuya tout particulièrement sur le kiswahili pour consolider ce nouvel Etat-nation, dont le modèle théorique suppose une cohésion de ses citoyens autour d’une identité commune. 

La thèse de Kyra Levine a le mérite de mettre en en lumière un pan méconnu de l’histoire coloniale allemande et de l’histoire du kiswahili. Car la période 1885-1918 est charnière pour comprendre le temps de la décolonisation et l’instauration d’Etats-nations dans la région Est-Africaine. En outre, l’histoire coloniale allemande amène à s’interroger sur les formes prises par le colonialisme allemand. La redécouverte du génocide des Herero et des Namas entraîna une réflexion sur les violences d’Etat perpétrées à large échelle, répétées avec l’Holocauste. En outre, les entreprises coloniales allemandes extra-européennes ne doivent pas faire oublier que l’Allemagne était un empire continental bien avant de s’aventurer outre-mer, que ce soit sous la forme du Saint-Empire-Romain Germanique, dissous en 1806, ou du Deuxième Reich (1871-1918). L’aspiration à l’expansion allemande, dans des buts de puissance, de prospérité ou de sécurité, visait autant les territoires d’Europe centrale que l’outre-mer. La Weltpolitik, soit l’acquisition de colonies extra-européennes grâce à une puissante force navale, et la Ostpolitik, soit la perception que la région de Mitteleuropa était l’espace impérial allemand, étaient donc intimement liées.

Kyra Levine procède de manière progressive et rigoureuse. Après avoir mis en contexte le colonialisme allemand, elle s’interroge sur l’usage imposé du kiswahili dans l’administration et dans l’éducation. Elle se tourne ensuite vers l’usage qu’en ont fait les colonisés. Enfin, elle fait le point sur les conséquences de l’emploi généralisé du kiswahili dans la période suivant la domination allemande. Pour ce faire, elle a minutieusement épluché de nombreuses archives à Berlin et à Dar es Salaam, des sources qui émanaient notamment de l’administration de la colonie d’Afrique orientale allemande : des décrets administratifs, des lois, des mémorandums, des transcriptions de réunions, des programmes éducatifs. Elle s’est heurtée à la multiplicité et l’autonomie des autorités allemandes, édictant des décrets ponctuels au gré des circonstances, rendant difficile de donner une vue d’ensemble de la situation. Elle parvient néanmoins à mettre en lumière, de manière synthétique et claire, les politiques linguistiques à l’œuvre dans l’Afrique orientale allemande, leurs enjeux, et leur portée.

THG

Sources iconographiques

  • https://www.axl.cefan.ulaval.ca/monde/swahili.htm
  • https://de.wikipedia.org/w/index.php?curid=5967467 
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Rencontre au Stammtisch 

Le mardi 17 octobre, une des deux élèves responsables de la rubrique « Sur le Vif » est allée à la rencontre des étudiants de licence, master et préparant l’agrégation en études germaniques, mais aussi venus d’autres départements (notamment via le théâtre franco-allemand). Ils se sont retrouvés à l’Avenue Café, au 19 avenue Philippe Auguste dans le 11ème arrondissement pour un certain évènement : le Stammtisch, organisé par Jonas Meir et Helene Schreilechner (professeurs pour 5 ans par le Deutscher Akademischer Austauschdienst). Le Stammtisch, c’est ce concept germanophone qui se concrétise par la rencontre d’étudiants autour d’un verre et dans le cas présent, de conversations en allemand et en français. Cette initiative, dans un bar assez spacieux, aux prix raisonnables et cette soirée-là très rempli, comble le souhait de certains étudiants de se rencontrer et est à la base une initiative de l’association Pierre-Berteaux. On peut choisir de venir pour de multiples raisons : rencontrer d’autres étudiants du département, qui s’intéressent à l’Allemagne, socialiser (car en cours on peut manquer de contact), ou encore parler allemand. Cela reste une bonne occasion si on ne prend pas l’initiative au quotidien.

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Le théâtre franco-allemand

Le département d’études germaniques propose un cours de théâtre franco-allemand auquel les étudiant·e·s peuvent participer en UE libre (avec une note) ou bien en loisir, rien que pour le plaisir et pour pratiquer l’allemand à l’oral. Cette année, les cours de théâtre sont organisés par Jonas Meir et Helene Schreilechner.

Une étudiante inscrite au théâtre et qui va régulièrement à cet atelier a eu la gentillesse de raconter son expérience, ce qui nous permet de vous présenter une séance-type de théâtre franco-allemand.

Chaque séance commence par des jeux d’échauffement qui mobilisent les étudiant·e·s et les font interagir. Souvent, l’accent est mis sur le ressenti du corps (das Körpergefühl) et l’étudiant·e apprend à définir ses émotions et à se mettre dans un autre état d’esprit pour pouvoir jouer différentes émotions.

Ensuite, les étudiant·e·s passent à l’improvisation. En général, ils et elles reçoivent des textes en allemand qu’ils et elles analysent puis jouent en improvisation en allemand.

Si cela vous intéresse de faire de l’improvisation théâtrale en allemand et de rencontrer d’autres étudiant·e·s du département d’études germaniques (licences et masters), n’hésitez pas à vous inscrire !

MOJ